Le premier roman d'Alexis Michalik se lit bien, c'est certain. Ce texte n'a rien de honteux, mais de là à affirmer que c'est de la bonne littérature pour la seule raison que le prodigieux dramaturge nous émerveille avec ses pièces géniales, il y a un pas que je ne franchirai pas.
Nous sommes en 2008, et Antoine Lefèvre a 26 ans ; c'est un mec plan-plan et mortellement ennuyeux qui s'apprête à se marier avec une certaine Jennifer. Flanqué de sa foldingue de soeur bisexuelle (absolument insupportable) et accompagné de son meilleur ami journaliste Laurent (originaire du Tchad et du Cameroun, noir, donc -- c'est important --, qui a démissionné pour voyager avec lui !), il part à la recherche de ses origines, à savoir son père, qui a quitté le domicile familial quelque vingt ans plus tôt et dont la Poste a réacheminé une carte postale venant d'Allemagne. D'Allemagne en Géorgie en passant par l'Arménie et la Turquie avant de finir à Bombay, Nouméa et Sydney, Michalik balaie des siècles d'histoire à travers ce roman initiatique en se focalisant sur le destin de personnages issus des minorités opprimées (Kurdes, Arméniens, Noirs, Juifs), ce qui est plutôt honorable en soi si ce n'était au prix de ficelles narratives plus qu'épaisses (hasards improbables, caractérisations a priori du caractère des personnages du genre : X n'était pas lâche, c'était un homme bon/juste... bla bla bla, évacuation des aspects pratiques ; l'auteur explique au lieu de montrer).
Les chapitres de récits rétrospectifs parachutés çà et là (pour expliquer l'histoire d'un nouveau personnage) n'aident ni à ressentir le moindre suspense, ni n'éveillent le moindre intérêt pour ces destins brisés mais rafistolés in extremis, Dieu soit loué ! Tout ça manque énormément de subtilité (et de féminisme), pourtant avec 650 pages, y avait matière !
Ce n'est certes pas un grand roman tant il lui manque de souffle romanesque et d'habileté narrative, à peine s'il est un agrégat de récits historiques enchâssés maladroitement, une compilation de situations plus rocambolesques et plus clichées les unes que les autres, des récits de vie bourrelés de "coups de chance", de héros "moins fermés que les autres", "plus courageux que la plupart", que des gens instruits et honnêtes, et j'en passe et des meilleures. Non ce n'est pas ce que j'attends de la littérature. N'est pas écrivain qui veut.