... dans un monde sans espoir.
Les livres dont je parle ces derniers temps sont rarement drôles. Moi qui n'ai pas connu les Hommes, de Jacqueline Harpman, ne fait pas exception à la règle. Doit-on lire des bouquins dépressifs quand on est déprimée ? Ou est-ce simplement pas hasard que mon regard se porte sur ceux-ci dans les librairies ou ma bibliothèque ? En ce qui concerne ce livre-ci, je ne peux pas dire que je n'étais pas prévenue : je savais à l'avance qu'il ne m'apporterait que peu d'espoir. Ou même, pas du tout.
Elles sont quarante femmes, prisonnières (tiens, comme par hasard) dans une cave, surveillées par des gardes muets. Elles n'ont pas le droit de se toucher, n'ont aucune intimité, ignorent ce pour quoi elles sont là, et comment elles y sont arrivées. Parmi elles, la narratrice, la "petite", celle qui n'a pas de nom parce qu'elle ne se souvient pas du sien. Elle était toute petite lors de son incarcération...
Le hasard fait que l' "événement" qui fait s'enfuir les gardes a lieu lorsque la clef de la cage se trouve dans la serrure. Les prisonnières vout retrouver la liberté. Mais quelle liberté ? Seules, sur une planète qui ne peut pas être la Terre, où elles découvrent ça et là des geoles semblables à la leur, mais peuplées de cadavres.
Seules.
Pourquoi ?
"La petite" et ses compagnes ne le sauront jamais.
"La petite", étrange narratrice, dont les sentiments sont aussi morts que ses ovaires. Enfant qui n'a pas connu l'amour, l'affection, la tendresse, plus que les hommes. Femme aussi étrangère à ses compagnes, qui elles, ont le souvenir d'un passé humain, qu'à ce monde dont elle finit - du moins en est-elle persuadée - par devenir l'unique "propriétaire".
Moi qui n'ai pas connu les hommes est un beau livre dans sa tristesse. Et au travers de cette femme neutre, presqu'insensible, un formidable hymne à ce qui lui manque. La douceur. L'amour. la société. Et les hommes.