François Bégaudeau a l’art des titres, mais l’art des titres excluants – ce qui me semble assez contraire à la philosophie générale de la gauche, si prompte à donner des leçons d’ouverture et de tolérance au monde entier.
Mais ceci est assez révélateur en vérité.
Nous l’allons montrer toute à l’heure.
Ainsi de Notre joie, qui succède à Histoire de ta bêtise : dans les deux cas, il s’agit, grâce aux adjectifs possessifs, ou de pointer du doigt en excluant, ce qui restreint terriblement la portée du propos, ou de s’exclure soi d’un groupe. Il y a d’un côté « eux » / « vous » (les pas gentils, les fachos, les identitaires, les gens d’extrême-droite qui refusent les étiquettes mais justement parce qu’ils sont des extrémistes (car Bégaudeau nous explique que refuser l’étiquette politique, c’est typique du camp des fachos. Il dit "rien ne le loge davantage que ce refus d’être logé") (on n’est prié de ne pas en rire) VS « Nous », les humanistes, les sensibles aux luttes sociales et aux prolétaires, les pas racistes, les ceux qui saluent la « déconstruction » dans la bouche des «féministes », qui parle de « gauche racisée », de ZAD, d’inclusivité, « d’intersectionnalité » etc.
Bref, les bonnes âmes d’un côté (même si on a droit à de timides réserves sur ce camp de babord à la fin, quand il revient sur ses bisbilles avec « la militance » qui lui reproche des propos prétendument sexistes), les esprits ternes, haineux et/ou étroits de l'autre. Bégaudeau ne peut pourtant que reconnaître que la gauche est bien souvent une professionnelle de l’intolérance : tout ce qui n’entre pas dans son logiciel est à jeter, à mépriser, à traiter avec condescendance ou arrogance. A remettre dans le droit chemin, à consoler avec paternalisme (ainsi de sa remarque sur M très en colère qu’il conviendrait de « prendre dans ses bras » comme un gamin capricieux, et tout irait mieux dans son pauvre petit monde).
La « patrie » (« déviance affectivo-verbale » selon lui), la « nation », « l’enracinement », le «mondialisme », tout cela ne veut strictement rien dire et les neuneus qui les emploient ne sont que de pauvres benêts rincés du bulbe par overdose de Soral ou Clouscard. Soral, que Bégaudeau est pourtant l'un des seuls, et c'est tout à son honneur, à ne pas l'avoir diabolisé (il a même quelques lignes dans ce texte en sa faveur) et qui a pris la défense d'Etienne Chouard lors de son affaire face à Denis Robert. Ce positionnement rend la verte attaque des idées défendues par les soraliens assez paradoxale, mais passons.
Pourtant, quelques pages plus loin, un accès de lucidité :
Patrie ne dit rien du monde, mais dit le père. La mère patrie est l’affaire du père (…) A soi seul le mot patrie remet de l’ordre dans la maison (…) La restauration de l’autorité est aussi (d’abord ?) la restauration des pères.
Le fameux M dira « Un enfant a besoin d’un père », Bégaudeau lira là l’aveu d’une faiblesse, besoin de protection superfétatoire, en politique aussi : mais qui pourtant peut prétendre que dans une famille un père n’est pas essentiel ? Ah mais je vais passer pour une vilaine militante de la Manif pour tous, peut-être, en disant ça ? J’en prends le risque.
Plus loin, Bolsonaro, Trump, Poutine, Assad : méchants. Tous dans le même sac. Gloubiboulga gauchiste à lunettes occidentales. Mais attention, on ne dit rien des dirigeants français, rien sur Macron, ça là-dessus, Bégaudeau est muet comme une carpe. On dénonce et on se cache derrière le « bloc autoritaire », le « capitalisme" mais on n’a rien à dire sur les agents en poste de la tyrannie sanitaire, rien sur les libertés publiques écrabouillées depuis deux ans, rien sur la disparition des contre-pouvoirs, rien sur les médias 100% aux ordres - rien.
Bégaudeau se dit sensible et concerné par « tout feu de paille plébéien », proche de tous les combats sociaux, mais n’a rien à dire sur l’instauration du passe sanitaire, rien sur la corruption généralisée de l’Etat, ni sur l’apartheid "sanitaire" français orchestré en coulisses par Davos. Et j'en profite d'ailleurs ici pour dire à François Bégaudeau que oui, la liberté existe, ce n'est pas un concept abstrait, ne lui en déplaise, et je vais lui dire à l'aune de quoi on la mesure : en en étant privé. Qu'il aille donc interroger les pompiers qui n'ont plus la liberté d'exercer leur métier, les mères qui n'ont pas pu emmener leurs enfants au cinéma, à la piscine ou au restaurant- les prolos privés d'emploi, de tout loisir, d'avion et de train, au mépris de notre devise et de nos lois, pour cause de non-allégeance à une entreprise délinquante de l'industrie pharmaceutique. Voilà ce qu'est la liberté : celle de jouir de quelques droits arrachés à la pesanteur des jours, puis d'en être privé par l'arbitraire d'un état voyou. Mais manifestement cette lutte sociale a échappé aux radars de ce penseur de gauche.
Il préfère railler goguenard les « complotistes » qui « se donnent des cibles explicites » (et donc ?), ceux qui pensent qu’« Attali », la « CIA » ou « « l’UE » sont en grande partie responsables de la situation. Comme si c’était faux ou que ça n’existait pas. Sidérant d’ignorance ou d'aveuglement. Aucun argument précis bien sûr, suffit de jeter l’anathème nominatif en se haussant du col, cela suffit. Mais bon, « on ne peut plus rien dire », écrit Bégaudeau, moqueur. Comment ne pas le reconnaître ? (écrit celle qui a écopé d’une amende de 10 000€ pour un post Facebook. Mais allons donc voir en Russie de quel bois ils se chauffent, n’est-ce pas ? Russie dictature méchante, France démocratie gentille)
L’idée de base de cet essai est de rendre compte de la teneur d’une rencontre impromptue suivie d’une longue discussion animée, un soir à Lyon. Suite à une conférence, l’auteur d’Entre les murs est abordé par un certain M (dont on apprendra par la suite, et ce n’est pas un détail, que cette lettre cache un Medhi…. Quoi ? un immigré patriote ? Qu’est-ce dont que cela, s’étrangle le gauchiste complètement perdu dans ses grilles de lecture usuelles), qui compte bien ferrailler verbalement avec celui qu’il considère comme son « idole » (sans que nul ne saisisse pourquoi). Eh oui, François, aussi incroyable que cela puisse vous sembler, il y a des immigrés qui se sentent profondément Français, profondément patriotes. Qui sont même presque plus « royalistes que le roi », parfois. Qui savent ce qu’ils doivent à ce pays, qui partagent ses valeurs, qui se souviennent aussi des raisons qui ont poussé leurs parents à quitter leur pays d’origine pour venir s’installer dans nos belles régions. Et il n’y aurait donc pas d’« identité française », pour vous (qui inscrivez ici vos propos dans ceux de Macron, « il n’y a pas d’art français »)? Pourquoi alors les immigrés choisissent-ils de venir, de choisir la France plutôt qu’un autre pays si ce n’est qu’ils savent y trouver la tolérance, l’humanisme et l’universalisme qui leur manque, si ce n’est pour en épouser les valeurs, le visage, la culture, l’Histoire, les mœurs ? (ce qui ne signifie par pour autant oublier d’où l’on vient, évidemment)
Pour Bégaudeau, les gens de droite ne côtoient les immigrés ou les pauvres que quand ils viennent « poser du parquet » dans leur appartement du XVIème ou qu’ils regardent un film de Ken Loach : j’ai trouvé ces remarques parfaitement déplacées, idiotes, dépassées, encore une fois. Parce qu’on a du fric, on ne peut pas être sincèrement touché par une cause sociale ? On est forcément un connard de raciste blanc dominant ? C’est insupportable de lire ça ! Des remarques qui me rappellent quand j’ai compris, embrassé et défendu avec joie la cause des Gilets Jaunes et qu’on m’a lancé au visage que de quoi je me mêlais, moi qui vivais dans un coin de milliardaires (sans savoir que je viens d’une famille très modeste). Affligeant. Avec de tels modes de pensées, on n'en sortira jamais.
Il est regrettable qu’un esprit intelligent comme François Bégaudeau ne soit pas capable de comprendre tout cela (aveuglement idéologique ? orgueil ? sectarisme ?). Il n’est pourtant pas idiot ni dénué d’humour et certains passages m’ont même fait éclater de rire (p.63-64), notamment lorsqu’il parle des marqueurs typiquement gaulois (la truculence, la grivoiserie, les blagues un peu grasses : bah oui, c’est aussi ça, la France, cela peut gêner aux entournures, mais ce sont des faits : on ne défait pas des millénaires d’esprit français parce que trois féministes déconstruites poussent des cris d’orfraie face à une remarque - qu’elles jugent - sexiste. Nous aussi pouvons bien tacler « les bonhommes » en retour : balle au centre. C’est ça la France : les hommes et les femmes y ont longtemps joui d’une belle entente car ils savaient se moquer – et se séduire - intelligemment les uns les autres).
En 2022, il y a donc encore des intellos comme Bégaudeau capables de nous bassiner avec un «fascisme » imaginaire, génie du semage de « confusion » selon lui. Heureusement, la gauche est là pour éclairer nos pauvres lanternes de débiles embrouillés qui ne comprenons rien à rien. Le problème, c’est que Notre joie consacre peu (voire pas du tout) d’espace aux mots de l’autre : on entend finalement très peu ce Medhi (que l’auteur nous brandit comme l’emblème, le parangon d’un esprit droitard confus manipulant une boue idéelle), on mentionne quelques mots et concepts entre guillemets qu’il utiliserait mais jamais ses arguments, ses exemples, son développement. C’est regrettable car cela déséquilibre le propos du livre qui devient un monologue de gauche, une digression (souvent pénible, parfois pertinente) de plus de 300 pages à la gloire de la gauche et de ses merveilleux combats, une gauche seule capable de faire de la politique, de penser le fait politique (c’est écrit noir sur blanc). On les a pas pourtant entendus beaucoup ces derniers temps alors que tous nos principes, à commencer par notre Constitution, sont foulés aux pieds.
Les autres à droite, si brumeux, ne font que se payer de mots et de concepts flous qui n’ont aucune réalité de terrain (p43). C’est vrai que les collectifs de défense de soignants, de résistance à la tyrannie sanitaire, les manifestations gigantesques de l’été 2021, la montée des médias alternatifs, les batailles patriotes contre l’obligation vaccinale et en faveur des traitements lui sont passées complètement au-dessus du bonnet, hélas. Mais ici il fait semblant de ne pas comprendre que c’est simplement l’espace politique qui n’est pas accordé aux patriotes, la présence dans les assemblées qui est refusée (absence de proportionnelle), les débats de fond qui sont censurés, les penseurs de ce courant qui sont bannis des médias, moqués, invectivés, traités de tous les noms (d’oiseaux), relégués aux marges. Donnerait-on l’espace qu’il mérite à un Asselineau ou à un Soral, on aurait tôt fait de voir que l’écho dans l’opinion publique est bien là. « L’ordre social » aurait alors du souci à se faire, mais voilà pourquoi cela n'arrive pas : l’ordre social n’autorise dans son espace que ceux qui ne le dérangent pas. Bégaudeau peut dormir sur ses deux oreilles.
« L’identité est ce qui en moi ne varie pas », écrit-il : bien, donc cherchons ce qui en France n’a pas varié. Je pense à la définition du Général de Gaulle : « catholique, race blanche, culture gréco-romaine ». Un bon début. Que des immigrés soient massivement arrivés depuis quelques décennies ne change pas le visage millénaire – majoritaire jusqu’à nouvel ordre – de celle qui fut longtemps «la fille aînée de l’Eglise » avant (hélas) de devenir l’un des pays les plus athées au monde (ce qui explique sans doute bien des choses, mais c’est un autre sujet). Qu’on le veuille ou non, c’est la majorité qui mène la danse nationale. Les exceptions ne sont là que pour confirmer la règle. Qu’est-ce qui rejoint le Français sous Rabelais et le Français sous Macron ? L’esprit d’irrévérence, la défiance face au pouvoir, l’esprit de rébellion, l’humanisme. Ca, c’est une partie de l’identité française, comme l’amour courtois, le goût pour la gastronomie, le gothique flamboyant : tout ça > identité française. Génie français. Assez de de ceux qui cherchent à réécrire ce que nous sommes depuis des siècles à l’aune des événements des 100/150 dernières années. Bégaudeau gagnerait à « dézoomer » un peu sa pensée, ça lui éviterait de parler « d’hypothétique francité ».
François Bégaudeau a tendance à faire des procès d’intention, des raccourcis simplistes, prétendant qu’un « vocable » tient lieu d’énoncé pour la droite (« Tu dis tradition et tu as tout dit »), sans voir que c’est non seulement faux, mais que la gauche fait strictement la même chose avec ses totems de « l’inclusivité » et autres « intersections ». La paille, la poutre, toujours.
Il dit beaucoup de bêtises au fil de ces 300 pages : « les femmes sont partout assignées, sifflées, harcelées, battues, violées » ... Partout ? Ah non, je connais plein d’endroits (majoritaires et heureusement) où ça se passe très bien merci, et puis mettre un sifflement et un viol sur le même pied d’égalité, on reconnaît bien là les mots des militantes décérébrées de #MeToo.
Ah mais attendez ici j’ai des propos qui taclent la « victimisation » des femmes, à tous les coups. La gauche a toujours un concept à sortir de sa manche et à brandir comme un rayon paralysant.
Oui, qu’on laisse entendre que les femmes sont de pauvres créatures invisibilisées et sans défense face à un patriarcat – allons même jusqu’à l'immonde BLANCtriarcat – qui les écrase depuis toujours est non seulement faux mais nuisible à la cause des femmes. Les femmes, qu’elles aient agi en coulisses ou sur le devant de la scène, ont été aux manettes et actrices de tous les combats tricolores, encore un morceau de l’identité française qu’on nous envie dans le monde entier et qu’on vient chercher ici. Il dit aussi que « Zemmour ne se présentera pas aux élections », trop jaloux de ses petits privilèges d’éditorialiste lui permettant de « jouir du désastre » ( !), qu’il est «pressé de renvoyer la nation au néant », que la « communauté nationale et la nécessité de la préserver » sont un « Père Noël » en lequel croient les vilains racistes. Je n’avais pas perçu l’abyssale crétinerie de ce propos mais je la mesure à présent.
Quelle pitié. Quel manque de discernement.
Le problème, c’est que François Bégaudeau est très crédule et naïf, qu’il est un enfant de France inter et du Monde, donc pas très bien informé, un enfant qui croit que le GIEC n’est pas « un organe de propagande », que Greta Thunberg est « courageuse et bien informée », que Polony est « souverainiste » (alors qu’elle bosse chez BFM ! trop drôle), qu’il y a bien un « privilège blanc » (ah je croyais qu’on était dans une lutte des classes et non des races, pardon), que le «pédagogisme » est une invention, que la crise sanitaire était vraiment une affaire de virus, que les frontières sont un trip de droite ou sous-entend que Raoult est un doux-dingue. Encore un peu et je pensais lire que Pfizer, c’était la « Science ». On l'a échappé belle.
La pensée identitaire est romanesque comme l’enfance. Rétive à grandir, elle veut demeurer dans son paradis d’avant l’histoire incarnée.
On croit rêver ! C’est un chantre du « vivre-ensemble » qui écrit ça ! Parce que « l’histoire incarnée» se résume au siècle passé ? Whaou ; ça manque un peu d’envergure et d’amplitude historique et temporelle, comme réflexion. Et puis les éternelles arlésiennes sur l’antisémitisme, le négationnisme (p.37/41), c’est d’un pénible ! Au lieu de s’interroger sur ce qui peut bien pousser certains à penser ainsi (se mettant à dos la totalité de la planète ou quasi, se tirant une balle dans le pied pour le plaisir ou la beauté du geste sans doute), Bégaudeau préfère plaindre ces pauvres esprits égarés. J’avais espoir quand il parle à un moment donné de la montée d’Hitler, se demandant ce qui diable a bien pu permettre son accession au pouvoir – mais son interlocuteur prof d’histoire d'alors ne lui avait pas répondu. Dommage.
Quelques éléments que j’ai trouvés pertinents : l’idée de fonder un livre sur une discussion (je pensais que c’était la « joie » commune du titre, la joie d’une « disputatio » à la française et bien équilibrée, je me trompais), ce qui est dit sur l’indignation est intéressant (Hessel ne l’avait-il pas appelée de ses vœux, aussi improductive soit-elle pour Bégaudeau), ce qu’il dit sur « la colère » aussi est bien vu, « combustible à mèche courte » insuffisante mais nécessaire à tout changement politique. J’ai aimé qu’il aspire à « ne pas se construire contre », à voir plutôt le verre à moitié plein, à prendre les choses avec optimisme et gaieté, plutôt qu’à voir tout en noir (ce qu’il reproche à la droite, alors que c’est faux).
Bégaudeau se veut tendance ascète et décroissant, se présente comme très peu matérialiste («lire et écrire » en mangeant des bananes dans son T2 lui suffisent amplement), il défend l’idée (intéressante) d’une « pauvreté affirmée, seule vie souhaitable » (ça se discute), croit en l’indépendance à base d’autarcie afin de se « désencastrer » d’un système invivable, il enjoint à se réapproprier une vitalité neuve, une force nouvelle à la fois morale et intellectuelle, appuyée non sur l’éducation mais sur "l’émancipation" de l’individu. Je ne suis pas contre, j’aime aussi le concept de sécession pure et simple d’avec un monde qui ne nous correspond plus, voire nous tue à plus ou moins petit feu. Ce sont les façons de faire et de sortir du jeu qui manquent encore, la suite dans les idées à généraliser mais nous sommes d’accord ici. Les dernières pages sont enfin un hymne à l’amitié et une invitation à l’errance joyeuse qui ne peut que parler et toucher tout lecteur.
Pour conclure, je dirais que si François avait pu voir la pure JOIE qui traversait les énormes cortèges spontanés de l’été dernier, cortèges mélangés, incroyablement hétérogènes, avec gens de tous âges, milieux, couleurs, avec des gens bien informés et parfaitement conscients, lucides, enthousiastes, défiant le pouvoir : ça, c’est la France et son identité. Et c’est un peu plus intéressant que le comité Adama ou « la gauche racisée ». Cette manie de mettre tout le monde dans un compartiment – « toi, tu es d’extrême-droite, tu ne veux pas d’étiquette politique donc tu es un facho, lui c’est plutôt bourgeois de gauche, l’autre c’est un libéral, lui un libertaire, moi c’est plutôt anar, lui c’est un communiste, l’autre un « faf » » etc. On estampille et on range dans des couloirs hermétiques ; on prétend parler avec tout le monde mais en fait on ne fait que monologuer, on ne convainc personne parce qu’au fond on méprise, on se sait au-dessus, on pontifie subtilement, on condescend, partant on n’évolue pas, en vrai on n’écoute pas, on s’écoute juste blablater soi, et à la fin on se retrouve tout seul comme un con à errer sans but dans les rues de Lyon.
Longue digression politique et intellectuelle autour de ce qui rejoint - ou plutôt sépare en l’occurrence, tristement - la droite de la gauche, célébration de l’amitié et des combats militants, démonstration de ô combien la gauche est à l’avant-garde de tous les progrès (hum), de ô combien les droitards se fourvoient dans leurs chimères qui ne mènent à rien et ne veulent rien dire ; un texte qui ne cherche pas l’harmonie de l’échange mais la hiérarchie des opinions (« tu confusionnes, j’éclaire » en gros) et qui en dit long sur le caractère obsolète du logiciel de gauche, qui n’a manifestement pas fait les dernières mises à jour de sa « boussole sociale » : « Notre joie » est ce texte bien écrit, parfois spirituel, pas idiot mais passant sous silence trop de sujets centraux, qui le rendent très parcellaire et hélas par trop manichéen.
Terminons sur une jolie note :
Chaque jour offre autant de raisons de s'affliger que de s'enjouer ; offre des strangulations et des moineaux. La décision ne se fait pas là mais dans le corps. Optimisme de la volonté, dit Gramsci.