"Nouvelles" de Salinger est indispensable, puissant, brillant, incroyable ; je viens sans aucun doute de découvrir un des meilleurs auteur de nouvelles mondiaux.
J'étais déjà fan de son attrape-coeurs, que je considère comme un de mes romans préférés. J'apprends maintenant que ce talent est transposable dans des récits d'une vingtaine ou d'une quarantaine de pages. Cet homme a un talent ahurissant pour créer des personnages fragiles, attachants, obsédants en quelques descriptions objectives et quelques dialogues. Car oui, les dialogues, peut-être ce qui sous-tend tout ce recueil. Avec simplement un don inouï pour les dialogues, Salinger réussit à créer toutes sortes d'émotions : la tristesse, l'incompréhension, la tension, l'ambiguité. Dans chaque nouvelle, ou presque, l'on termine avec un sentiment de "pas terminé" très jouissif, qui nous pousse à utiliser notre imagination, nos ressorts logiques, voire à relire certains passages afin de comprendre où voulait en venir l'auteur.
Dans les meilleures nouvelles, je place bien évidemment la première, "Un jour rêvé pour le poisson-banane", une nouvelle pleine de sens, avec une fin absolument incroyable, un personnage charismatique, des dialogues savoureux ; "Pour Esmé avec amour et abjection", également brillant, dans lequel on retrouve l'auteur et ses traumatismes de la seconde guerre mondiale ; "Teddy" et son personnage incroyable qui reflète d'une certaine manière la première nouvelle ; "L'époque bleue de Daumier-Smith", peut-être une des plus passionnantes à analyser ... Toutes les autres sont également géniales, perturbantes, questionnantes, superbement écrites, pleines de suspenses et de personnages attachants.
Vous aurez compris, j'ai dévoré ce recueil de nouvelles. Tout m'a plu : la construction narrative de Salinger y est extrêmement intelligente, pleine d'ellipses pour encore plus nous perturber ; les personnages, leurs obsessions, leurs déchéances ; les métaphores. Si vous voulez découvrir d'incroyables nouvelles, foncez, foncez, foncez : la seule déception sera qu'il n'y en a que neuf.