Cas difficile que celui d'Oblomov. Le postulat de départ est original -ou en tout cas, j'ai jamais lu quelque chose dans ce style- et absolument hilarant (de mon point de vue) : Oblomov est un petit noble qui passe ses journées à dormir, ne voit d'intérêt en rien et est plus que tout terrifié par la perspective de prendre une décision.
Le lecteur un peu timide se demandera sûrement comment on peut tenir 500 pages -la taille du roman- sur un tel postulat, mais je ne m'inquiétais pas: s'il a bien une chose que la littérature russe sait faire, c'est de rendre un personnage a priori affable fascinant.
Ca commence très bien. La première partie et demi du roman est un fantastique morceau de littérature, avec un Oblomov introduit de manière magistrale et une première galerie de personnages qui se succèdent à toute vitesse, donnant chacun leur petit coup de pinceau sur le tableau que représente Oblomov. Cette séquence est célèbre par le fait que le héros ne sort de pas de son lit durant les 150 premières pages, et non, ce n'est même pas chiant. Oblomov n'est pas exaspérant -pas encore-, et je ne pouvais à ce moment qu'être ébahi par le côté intemporel de l'histoire et le caractère d'Oblomov. Vraiment, je n'avais jamais lu quelque chose comme ça.
Et puis ça se gâte. Vers le début de la deuxième partie. Oblomov trouve l'amour et... putain c'est long. Vous voyez ces séries basées sur un duo d'enquêteurs de sexes opposés mais au physique toujours avantageux, qui se chauffent pendant huit saisons sans jamais baiser ? Ben là c'est pareil, mais en pire (je crois qu'on dépasse jamais le stade du baiser sur la main). Surtout, Oblomov arrête d'être attendrissant et devient franchement chiant. Repousser la femme de vos rêves pour des raisons à la con, c'est marrant la première fois, limite la deuxième aussi, mais quand ça s'étale sur 200 pages ça finit par bien taper sur les nerfs.
Heureusement, la fin rattrape tout ça. Je raconte pas pour ne pas spoiler, mais c'est doucement mélancolique, Oblomov se calme, revient dans ses rails, et le livre se referme avec une violente sympathie pour le personnage le plus pathétique que j'ai pu croiser dans la littérature russe.