J'adore Verne : mais ce premier "jet" de roman est fort mauvais : intrigue inexistante, personnages fades, dialogues didactiques ratés ; le final, un clin d'oeil en négatif à celui du Père Goriot, manque de souffle.
Il n'en demeure pas moins que sa vision d'un Paris 1960 est amusante : disparition des humanités (jugées inutiles - les quelques passages sur l'enseignement du latin et du grec ont fait rire jaune la prof de lettres classiques que je suis) et de l'art au profit de la technique/mécanique/industrie/grande finance, éducation nationale centralisée, capitalisme/consumérisme flamboyant, grands magasins culturels dépourvus de fonds culturels mais débordants de nouveautés, réseau de métro proche du nôtre, périphérique, simili-ordinateurs, Paris en ville lumière où l'électricité domine et illumine de larges allées de magasins, passage-éclair de voitures silencieuses, port de Grenelle illuminé par un phare qui darde son oeil incandescent sur la ville, musique électronique jouant avec la discordance, problèmes de logements exigus impliquant la création de meubles convertibles...
Cette vision sardonique du progrès et ce passéisme (on encense les valeurs/écrivains/musiciens du passé - les contemporains préférés de Verne, Hugo en tête) sont un peu étonnants de la part de Verne, mais font doucement sourire. Dommage, vraiment, que l'écriture et la structure du roman ne suivent pas, car ce Paris de 1960 sonne curieusement juste.
(Bonus esthétique : la dernière édition comporte une couverture et deux illustrations de Schuiten, qui cite ce livre comme inspiration pour l'esthétique des Cités Obscures... et pour la conception de la station de métro Arts&Métiers, bel hommage au Nautilus de Verne).