Pimp : mémoires d'un maquereau par Isabeau

Attention, âmes sensibles ou dépressifs, s'abstenir !!

Pour ceux qui ne sont pas encore convaincus de la bassesse humaine, il faut lire ce livre. Evidemment, quand on mange trois fois par jour, que notre penderie est pleine à craquer, que notre appart bien insonorisé donne sur un beau jardin propret, que papa est prof et maman infirmière, on a l'impression de découvrir une autre planète. Face aux difficultés des personnages de ce livre, nos petits problèmes nous paraissent très, très secondaires, voire négligeables.

Je ne dirai pas qu'on l'on doit aimer ce livre. La question n'est pas là. Il faut plus le considérer comme un documentaire, certes très cru et très brutal. C'est d'ailleurs le but de l'auteur qui n'a jamais prétendu écrire pour faire plaisir. Il informe et dénonce.

Evidemment, ce n'est pas très bien écrit (mais après tout, l'auteur est un ex-maquereau inculte. Son passage à l'université a été trop bref pour qu'il lui soit profitable). Avalanche d'évènements, absence de descriptions et d'analyses précises, on saute du coq à l'âne. La méthode du flash back est intéressante mais quand on lit la fameuse trilogie du ghetto de Slim, on se rend compte que ce procédé est en fait une manie quasi automatique.

Le fil conducteur des 3 tomes : l'oppression des Blancs sur les Noirs qui se réfugient dans un monde parallèle, souterrain, qui a ses propres codes et ses propres lois, fondées sur une très grande violence et une quête effrenée vers l'argent. La question qu'on est en droit de poser : les Blancs, qui refusent de partager démocratie, richesses et pouvoirs aux minorités, sont-ils les seuls responsables de toute cette violence et misère ? L'auteur, s'il parle abondamment du racisme et des discriminations, ne répond jamais. Peut-être vaut-il mieux évoquer une spirale du mal qui dévore tout et tous sans aucun espoir de rédemption.

Comme l'explique l'auteur (il se décrit comme atteint du "vice de la rue"), sortir de cette jungle paraît dur, voire impossible : on y naît (par hasard), on y souffre (beaucoup), on y meurt (assassiné, suicidé ou victime de l'alcool et de la drogue).

Tous les personnages sont un jour ou l'autre confrontés à l'alcool (Trick Baby), au viol (Otys), à la drogue, à la violence etc. On peut même se demander s'il s'agit de travers anormaux quand ces faits rythment leur quotidien.

Quoiqu'il en soit, voici un livre qui casse le mythe d'une Amérique tolérante où il fait bon vivre. Rappelons-nous que les Etats-Unis constituait un modèle dès années 30 jusqu'aux années 70, période où se déroulent les faits du roman. Gardons-nous toutefois de prendre un ton moralisateur : les mêmes problèmes existent partout dans le monde.