Ravage, un roman d’humour noir ?

Lu à l’adolescence, j’avais gardé le souvenir d’un livre d'humour noir un peu dans la même trempe que la bd de Franquin « Les Idées Noires » dont j'étais déjà très fan, tout ça mêlé à une caricature de livre catastrophe et d’aventures, c'est vous dire !
Cependant, je me suis aperçu en le relisant, dernièrement, que j’avais oublié presque tout le fond de l’histoire en elle-même. La critique d’une société complètement dépendante de la technologie et du progrès scientifique.
Pourtant, c’est vrai qu’il y a des passages humoristiques :
« Avec un ensemble parfait, les girls firent demi-tour, montrèrent leurs fesses peintes en tricolore. C’était l’apothéose. »
« Le ministre des Sports s’est jugé incapable de venir à pieds de Passy »
Voir même l’apparition hallucinante d’un homme semblable au Christ.
« L’homme marchait sur leurs traces. Il tourna la tête, regarda autour de lui :
- Comme il fait sombre ici, remarqua-t-il.
Puis levant les bras, il ajouta :
- Que la lumière soit !
- Je vous demande pardon, fit remarquer François, mais vous empiétez. Ça, c’est le rôle de Dieu le Père. »
Ou les descriptions un « rien » exagéré des catastrophes :
« Une formidable explosion entrouvre la colline. Des pans de murs, des colonnes, des rochers, des tonnes de débris montent au-dessus du fleuve, retombent sur la foule agenouillée qui râle son adoration et sa peur, fendent les crânes, arrachent les membres, brisent les os. Un énorme bloc de terre et de ciment aplatit d’un seul coup la moitié des fidèles de la paroisse du Gros-Caillou. En haut de la tour (Eiffel), un jet de flammes arrache l’ostensoir des mains du prêtre épouvanté. Il se croit maudit de Dieu, il déchire son surplis, il crie ses pêchés. Il a envié, parjuré, forniqué. L’enfer lui est promis. Il appel Satan. Il part à sa rencontre. Il enjambe la balustrade et se jette dans le vide. Il se brise sur les poutres de fer, rebondit trois fois, arrive au sol en lambeaux et en pluie. »

En revanche, je trouve peu crédible de voir dans ce roman une adhésion de l'auteur aux idées du régime de Vichy.
Pour ma part, je pense même qu’il s’agit au contraire d’une parodie du totalitarisme et que quelques-uns ne voient plus malheureusement le second degré.
Qui pourrait penser par exemple que Barjavel en tant qu’écrivain soit partisan d’un autodafé ?
Et puis François Deschamps, avoir un tel blaze, c’est trop gros pour être pris au sérieux.
Enfin, je suis assez d’accord avec ce que j’ai pu lire sur d’autres critiques parlant d’une histoire allant decrescendo. Puisque l’intérêt de ma lecture a diminué au fil du récit. Excepté le passage des chauves-souris qui se trouve vers la fin, dans le chapitre « Le chemin de cendres ».

Reste que dans son ensemble, c’est un livre que j’ai assez apprécié notamment pour son côté d’anticipation, très visionnaire pour l’époque ... Et son humour noir.