D’une verve et d’une malice d’une tristesse infinie, la rencontre avec Bandini. Au détour de Bunker Hill ou d’ailleurs, anecdotique, improbable, fatidique. « My first collision with fame was hardly memorable », bon. D’accord, peu importe (abrutis). Et l’ironie, et la désillusion, et l’amertume, et la tendresse, surtout la tendresse ? C’est la neige éternelle de Boulder, Colorado, elle est partout, dans tous tes pores, dans tes yeux jusqu’aux entrailles, et toi la neige sur le macadam d’Hollywood, tu fonds. Il est doux-amer, le Bandini, toujours à côté de lui-même, toujours un peu dans la souffrance de celui qui aime déraisonnablement cette chienne de vie. Dio cane. A côté de lui-même, Bandini : il a ses rêves, et il a Bunker Hill : Vil Coyote et Bip Bip, les rêves de Bunker Hill. C’est toujours le même roman qu’il écrit au fond, la souffrance de l’indicible et de l’inaudible, sale minable, l’écrivain raté. Loser magnifique, Bandini. « The most famous unknown writer in America », les Coen feront de grandes choses avec toi, tu verras. Toujours le même livre, tragique ; mais quand même, Bunker Hill…

Bunker Hill, c’est le zénith, l’immortalité de Bandini dans une phrase, la toute petite, insignifiante, dernière phrase. « But what the hell, a man had to start someplace ». L’ironie, la désillusion, l’amertume, la tendresse abîmée de tristesse. Un roman d’apprentissage, ma gueule, apprendre à ne pas apprendre, l’histoire d’un mec qui n’en peut plus d’aimer la vie jusqu’au bout des stances. « But what the hell », le tragique de l’existence tout entier, l’immortalité des rêves, « a man had to start someplace ». Bandini, le cowboy de minuit à l’assaut de la littérature, pour ne pas rater un rencard avec la vie. Il faut bien commencer quelque part.
Elensar
9
Écrit par

Cet utilisateur l'a également mis dans ses coups de cœur et l'a ajouté à ses listes et Cette fin, cette claque

Créée

le 25 août 2014

Critique lue 341 fois

6 j'aime

1 commentaire

Elensar

Écrit par

Critique lue 341 fois

6
1

D'autres avis sur Rêves de Bunker Hill

Rêves de Bunker Hill
AlexandreKatenidis
5

Galerie de portraits et misère créative

Un jeune auteur essaie de faire son trou à "L.A." et subit l'amertume d'un petit monde clos. Il en végète, et, dans son errance, croise une série de portraits hauts en couleurs. L'ambiance n'est pas...

le 21 sept. 2018

1 j'aime

Rêves de Bunker Hill
Hunkarbegendi
7

Critique de Rêves de Bunker Hill par Hunkarbegendi

Dicté à sa femme Joyce alors qu'il approchait de la fin de sa vie, Rêves de Bunker Hill clôt la quadrilogie Bandini. L'alter-ego de Fante est ici un jeune fils d'émigrés italiens arrivé du Colorado à...

le 10 août 2021

Rêves de Bunker Hill
BenoitBarbibul
7

Une galerie de portraits décalés

Pour avoir lu l'intégralité des oeuvres de John Fante de la saga Bandini, ce dernier ouvrage semble sans conteste en être le plus décalé, presque loufoque. Concentré sur l'univers hollywoodien de Los...

le 19 févr. 2019

Du même critique

Good Morning England
Elensar
8

But all over the world, young men and young women will always dream dreams and put those dreams into

J'écris ces mots à côté de ma vieille platine qui fait tourner mes vieux vinyls des Stones. Good Morning England n'est pas le plus grand film de tous les temps. L'histoire est courrue d'avance, les...

le 21 juil. 2011

14 j'aime

Souvenirs goutte à goutte
Elensar
8

Critique de Souvenirs goutte à goutte par Elensar

Omoide Poroporo doit être, injustement, l'un des films les moins connus du studio Ghibli. S'il est vrai que l'on s'éloigne ici de la fantaisie de Miyazaki pour entrer dans un univers plus réaliste,...

le 13 mars 2011

11 j'aime

Porco Rosso
Elensar
9

"Je préfère encore être un cochon décadent qu'un fasciste"

Porco Rosso, c’est l’histoire d’un chasseur de primes mais pas sans foi ni loi, qui préfère être un cochon qu’un homme, et qui pourrait tout aussi bien être américain tant il aime la liberté. Porco...

le 10 mars 2014

9 j'aime

1