La faute à pas de chance

J’avais lu enfant une version abrégée de Robinson Crusoé et j’en avais gardé un très bons souvenir.
Je l’ai relu dans sa version intégrale, et là, mon avis à un peu changé …
Pour commencer, Defoe nous fait revenir en arrière en cours de roman avec l’écriture du journal de Robinson. Il détail des éléments qu’on a déjà lu, ajoute d’autres éléments. On s’aperçoit d’ailleurs d’une incohérence sur l’âge de Robinson. Il omet aussi des points importants, comme le fait de savoir quand même comment il s’est procuré le feu ?
Et puis, par la suite, il ne fait plus mention de ce journal. Pourquoi ce long retour qui casse le rythme de l’histoire ?
A partir de la découverte de l’empreinte d’un pied sur le sable, c’est à dire à la moitié du roman, on peut dire qu’on tient là enfin un rebondissement depuis le naufrage.
Il y aura aussi des visites de cannibales venant faire des grillades sur son île et laissant pleins de détritus derrière eux sans nettoyer (salauds de touristes), et un bateau espagnol qui s’échouera lui aussi, (on a retrouvé le triangle des Bermudes) tout cela contribuant à donner un nouveau (faible) intérêt au roman.
Puis il y a la rencontre avec Vendredi, la créature comme l’appelle respectueusement Robinson, son bon serviteur, ou son pauvre sauvage (tout dépend de son humeur badine, ou pas… )De là on repart dans des travers pénible. Robinson inculque sa religion (en sauveur d’âme) à Vendredi, le misérable impie. Il s’attache donc dès lors à civiliser cette pauvre créature qui n’est qu’une brebis égarée à ses yeux, boulottant du bonhomme. Il fait, à son sujet, une morale qu’il n'avait pas supportée venant de son propre père. Mais il se dit lui-même roi sur son île et estime donc avoir droit d'autorité sur ses sujets.
La fin du livre va se terminer par un retour de Robinson avec d’assez curieux passages. Robinson devenant Général 5 étoiles face à des mutins, puis grand trappeur lors d’une attaque de 3 loups monstrueux et un ours dans les Pyrénées. Puis comme c'est un peu p'tit bras, il luttera contre une meute d’une centaine de loups et tant qu'à faire il y aura un final avec plus de 300 loups. Dire que pendant près de 30 ans sur son île déserte, il n'est pas fait mention de la moindre attaque de quelques bestioles que ce soit. Pas même un moustique.
Et là, on se dit quand même que le gars n’est vraiment pas né sous une bonne étoile.
Quand il prend le bateau, c’est naufrage ou pirates, quand il évite de prendre la mer c’est les loups qui attaquent. On est presque étonné que les gens qui ont géré ses intérêts durant sa longue absence ne lui aient rien fait à l’envers.
Sachant que ce livre a été rédigé en 1719, j’ai essayé de nuancer m’ont ressenti. Mais en fait, je crois que ce roman est trop empreint de son époque, et qu’il a mal vieilli tout simplement.
Comme il est écrit à la première personne, il demande au lecteur une implication qui m’a été impossible de par les idées moralisatrices et arriérées du récit et qui m’ont rendu, justement pour le coup, étranger à l’histoire de Robinson.
Etait-ce peut-être une comédie décalée de Defoe ? Ça, ça aurait pu être drôle du second degré ! Les clichés du colon étant suffisamment fournis.
Pour terminer, j’ai souffert sur cette lecture comme rarement. Je me suis pris à maintes reprise de devoir relire des passages lus mais sans rien retenir du contenu.
J’étais pourtant très enthousiaste en début de lecture, avec un bon souvenir de ce roman, qui je crois, m’aura déçue d’autant plus. Le premier tome m’ayant suffisamment lassé, je ne poursuivrai pas sur le second, le récit étant mal raconté et pas captivant.
Cette histoire a le mérite d’être à l’origine de plusieurs romans sur le thème dit depuis de la robinsonnade, dont certains sont largement plus passionnant.