Un divorce et quelques enterrements
Là-bas, on boit en gentleman.
On ne mélange pas les classes sociales. Encore moins les couleurs de peau.
Les femmes ne sont qu’épouses ou mères.
Là-bas, on cultive l’art de la suggestion, du non-dit.
Rien n’est plus terrifiant que les méandres de l’esprit humain.
L’horreur décryptée est démystifiées. Banalisée. La violence fantasmée, elle, a pour seule limite l’imagination du penseur.
Là-bas, dans la moiteur du Mississippi, le visage de la justice est voilé. La politique gangrène les tribunaux. Les tabous empoisonnent la vérité.
Quelle vérité ? A quoi bon ?
Il est question de vies humaines bouleversées, d’existences dénuées de sens, condamnées avant d’avoir existé.
Alors la vérité n’a qu’une importance relative. Elle se plie, elle aussi, au jeu sordide de la subjectivité.
La fureur, là où la loi des hommes n’a plus prise depuis longtemps, n’éclate jamais au grand jour. Elle se tapit sous la surface, derrière les yeux froids d’un meurtrier. Terrifiante, sous-jacente.
Puis vient un homme.
Etre homme, là-bas, c’est une affaire de choix. Choisir son camp car la neutralité face à la mort et à la justice populaire n’existe pas.
Etre un homme, un gentleman du Sud, c’est se battre pour parfaire la rotation de l’univers, armé de la seule certitude du bien fondé de son action.
C’est découvrir ses propres faiblesses à travers celles des autres, en porter l’insupportable fardeau.
Et pleurer.
Sanctuaire, c’est la littérature de l’imaginaire, du ressenti.
Une littérature qui ne tolère ni inattention ni demi-mesure.
Un verbe riche, hautement métaphorique.
Un instantané de vies humaines poisseuses, repoussantes.
Une plongée dans les bas-fonds de la conscience.
Un déclin assuré dès les premiers instants.
Une expérience sensorielle d’un réalisme saisissant qui ne saurait laisser indemne.