Les personnages, les personnages et encore les personnages. Tout est dit. L'intrigue est, avouons le, un peu légère. On en a lu des plus travaillées, des plus tordues et haletantes. Mais on s'en fout complètement. C'est intelligent et délicatement décalé, comme toujours. Le choix des formules et l'inventivité de l'auteur sont toujours un régal, chaque personnage a sa propre mouche au casque et l'entretien avec le plus grand soin et un certain mépris pour la bienséance. Dans le cas du personnage de Clément, jeune imbécile un peu trouble suscecté de terribles meurtres, la folie est tantôt attendrissante, tantôt menaçante. Tout en lui sonne juste, de son enfance misérable à son langage maladroitement construit en piochant ci et là quelques formules toutes faites ("Je veux plus en parler, je suis fatigué avec ces femmes. A force d'en parler personnellement, ça me donne envie d'une" p. 55). Marthe, son cigare, sa gouaille, son attachement acharné à Clément est irrésistible ("- Il a fait du grabuge ton Clément ? - Il a rien fait. C'est tous les autres qui en veulent après lui. - Tous les autres qui ? - Les cons" p. 28). Louis, son amphibien et ses traductions hasardeuses de Bismarck est génial. Et je ne parle même pas de Marc, Luc, Mathias et Vandoosler le vieux, adepte des "situations merdiques". On tombe amoureux pour moins que ça.
Ce qui me plait surtout dans l'écriture de Fred Vargas, c'est l'attention portée aux petits détails de la vie quotidienne qui sonnent toujours juste et donnent à chacun de ses romans une couleur particulière.