De Stephen King tout le monde connait le romancier, ses lecteurs ont également en tête le novelliste. De Brume au Bazar des Mauvais Rêves, l’auteur a publié plus de trois-cent-vingt nouvelles pour six recueils, d’une qualité plus ou moins constante. Dans un entre-deux se situe également une longue tradition kinguesque : les recueils de novellas, invariablement quatre courts-romans par volume. Si ça saigne est de ceux-là, le cinquième depuis Différentes Saisons qui accuse aujourd’hui ses 35 ans et a donné lieu à des adaptations au cinéma comme le sublime Les Évadés.
Allons tout de suite droit au grand point positif : Si vous avez aimé certains de ses classiques publiés avant les années 2000 et ne connaissez pas sa dernière période, Si ça saigne offre un honnête panorama sans pour autant vous désorienter.
Car l’auteur a ses monomanies, comme beaucoup d’auteurs, et ne prive pas d’en écrire de nouvelles variations. La condition du métier d’écrivain, la nostalgie de la jeunesse, l’enfance, les médias (et les moyens de communication). Si internet et le Iphone, Steve Jobs étant même cité sont bien évidemment des nouveautés par rapports aux vieux Stephen King, on ne peut pas dire que le traitement et les thématiques soient particulièrement originales.
Si variations il y a, autant parler de fines nuances ; Vous avez apprécié son thème faustien dans Bazaar ? Rat vous le ressert, en plus concis et si plan-plan que l’on ne rencontre aucune surprise dans sa conclusion des plus attendues. Autant dire du réchauffé. De nouveau un thème pseudo-faustien dans une redite de L’Outsider sans additif avec la désormais inévitable Holly mais avec un peu du Rapace Nocturne dedans ? Même résultat, truffé de « spoils » pour ceux qui auraient loupé son roman précédent.
La vengeance que l’on regrette ? La technologie ? Le ressassage d’une dépression d’écrivain ? Lisez plutôt Sac d’Os, Revival ou La Part des Ténèbres. Ils sont bien plus qualitatifs que ces synthèses sans éclat.
J’ai également le sentiment que les parenthèses s’accumulent de plus en plus chez Stephen King au sein du texte pour jouer le garde-fou d’un éventuel verbiage. Un résultat plus court, plus serré mais sans les trouvailles qui faisaient le sel de certains textes comme les italiques de Ça ou du Fléau, pour ne citer qu’eux.
Pourtant, tout n’est pas à jeter et la lecture d’un petit chef d’œuvre comme « La Vie de Chuck » redonnera un sourire même à ses détracteurs, rappelant certaines expérimentations de textes s’entrecroisant comme Cœurs perdus en Atlantide gardant la même vivacité, les mêmes personnages joliment croqués en quelques lignes et même, chose rare chez l’auteur, un certain talent pour conclure avec du rythme.
En définitive, un King que je qualifierai de passable, sans réel déplaisir, mais transmettant tout de même un sentiment de lassitude assez net à l’exception d’une seule novella.