Aujourd'hui maman est morte.
A lire dans le cadre du programme de Lettres de l'ENS Lyon 2014-2015 "L'Autobiographie" : http://www.senscritique.com/liste/L_Autobiographie_ENS_Lyon_2014_Litterature/563892
Si le Grain ne meurt n'est pas une autobiographie indispensable. Ce n'est même pas l'autobiographie de Gide. Enfin si, mais disons que ce n'est pas la seule. Toute l'oeuvre de Gide est autobiographique, et lui-même l'avoue, étant donné que celle-ci, qu'il avoue lui-même être ses "mémoires" (textuellement faux, étant donné que les mémoires doivent être inscrites dans une période historique concrète, comme celles de Chateaubriand ou du général de G.) comporte de nombreuses références à ses oeuvres romanesques : "j'écrivais Amyntas" ou "elle a pu m'inspirer pour La Porte étroite" etc.
C'est donc une oeuvre totalisante, l'oeuvre de sa vie, tant au sens propre (puisqu'il raconte de nombreux épisodes de sa vie) qu'au sens figuré (puisqu'il fait une somme de toute ses oeuvres). Ce n'est pas mon préféré de Gide (qui reste la Porte étroite) mais le style est toujours très fleuri et poétique (si bien que j'ai eu du plaisir à comparer cette autobiographie avec la Recherche proustienne). Les épisodes choisis ont tout loisir à être analysés en détail, tant par des psychologues, par des psychanalystes ou par des critiques littéraires; les références précises à ses autres oeuvres sont très instructives (pas de référence aux Faux-Monnayeurs en revanche, bien que l'amour d'Edouard pour son oncle se fasse souvent entendre derrière les relations plus qu'amicales que Gide entretient avec des jeunes Arabes; les Faux Monnayeurs ayant été publiés un an avant Si le Grain ne meurt, on peut supposer qu'il n'a pas eu le temps d'y attacher un vécu, là où son histoire cesse avant 1900).
Gide ne révolutionne pas le genre, et se contient dans des cadres assez stricts de l'autobiographie, bien que sa pierre à l'édifice soit justement que cette oeuvre n'est qu'une pierre à l'édifice de son autobiographie, qui est toute son oeuvre. Il serait intéressant par ailleurs d'examiner le fait qu'il arrête son récit à la mort de sa mère et à ses fiançailles avec sa cousine Emmanuèle (Madeleine en réalité).
Bref, une oeuvre intéressante, qui se lit très agréablement (sauf si comme moi vous l'étalez sur vingt pages dans le métro par jour sur un mois) et qui permet de se délecter de la poésie gidienne tout en comprenant certains pans de son inspiration littéraire.