Ça y est, j'ai officiellement terminé le dernier pavé en date de King et celui-ci a ceci de particulier qu'il a été écrit à 4 mains avec son fils, Owen. Fervent lecteur du premier, je ne connaissais par contre absolument pas son fils (du moins ce fils-là... car King semble avoir transmis son don pour les histoires accrocheuses, notamment à Joe Hill, dont les romans m'avaient séduits), et force est de constater que l'on retrouve indubitablement la patte qui a fait son œuvre prolifique.
On retrouve en effet la petite ville américaine typique, ses personnages truculents toujours aussi bien décrits, les innombrables interactions (que l'on peut lire dans Dôme, dans 22.11.63, dans Ça... pour ne citer qu'eux) entre les protagonistes.
On retrouve également un point important du roman de King : la femme-héros. Loin des clichés macho de l'homme sauvant in extremis la femme sans défenses véhiculée par pléthore de films d'horreur (entre autre), King a souvent placé la gente féminine au centre de ses romans : Carrie, Dolores Claiborne ou même Ça, où Beverly joue un rôle clé. Et c'est indubitablement le cas dans Sleeping Beauties, sauf qu'ici ce n'est pas une femme-héros, mais plutôt des femmes-héros.
Mais qu'en est-il réellement ?
On pourrait résumer le bouquin comme le récit d'une pandémie. Mais une pandémie d'une maladie un peu spéciale, touchant uniquement les femmes, les plongeant toutes, les unes après les autres, dans un sommeil duquel elles ne se réveilleront pas. Drapées dans un cocon style chrysalide, mieux vaut ne pas les réveiller ou alors vous vous retrouverez devant un être enragé, sans la moindre once d'humanité, promesses de bains de sang et d'éclaboussures de cervelle. Des scènes qui ne sont pas sans rappeler Cellulaire, du moins dans les descriptions vives et riches en hémoglobine.
Outre cette histoire, Sleeping Beauties est une belle métaphore flirtant avec le féminisme engagé, d'un monde sans femmes (où les hommes tentent de survivre en se faisant la guerre) et d'un monde sans hommes (où les femmes survivent en s'entraidant), sans toutefois tomber dans les travers d'un manichéisme pourtant parfois tentant. La métamorphose symbolisée par le cocon, le thème des armes à feu, des dirigeants tyranniques (quand on connaît la haine de King pour Trump, on le voit presque dans la peau de certains personnages), et celui de l'Afterlife, qui devient incontournable dans tous les derniers romans de King. Comme si l'auteur se tournait de plus en plus vers cette question lancinante de ce qui nous attend tous après la mort...
Bref, un roman passionnant, facilement lisible en VO (si, si, malgré les 700 pages qui peuvent paraître rédhibitoires, c'est largement faisable), qui prouve une fois encore que non, King n'est pas que un écrivain d'horreur. Il est le conteur passionnant de l'Amérique contemporaine. Et apparemment ses fils sont sur le bon chemin pour le devenir également.