"Mona Chollet a très bien décrit l'approche de la sorcellerie comme puissance féminine, le succès de son livre n'est pas anodin", a déclaré Marlène Schiappa. J'ai l'impression qu'on n'a pas lu le même livre (ou alors qu'elle n'a lu que le titre ????).
Mona Chollet revient sur les chasses aux sorcières qui se sont produites en Europe à partir des temps modernes pour essayer d'en pointer, le plus rigoureusement possible, les restes de misogynie que nous rencontrons encore aujourd'hui.
La première des 5 parties, la longue introduction de ce livre, se concentre surtout sur le passé et les faits historiques notables de ces derniers siècles, qui font froid dans le dos. Tant de violences perpétrées envers les femmes, c'est quand même un choc à encaisser.
En lisant des critiques de cet essai, j'ai vu des gens s'inquièter d'une relecture féministe du monde. Mais une relecture du monde n'en est pas une réecriture. 80% des gens condamnés pour sorcellerie sont des femmes et les 20% d'hommes condamnés le sont pour des faits de sorcellerie secondaires, qui impliquent souvent la fréquentation de femmes sorcières plus que d'actes présumés.
C'est un fait et Mona Chollet a décidé d'approfondir sa thèse selon laquelle en relisant l'Histoire avec ces yeux-là, on comprendrait de nouvelles choses sur le monde actuel.
Son livre est un essai donc je ne comprends pas qu'on puisse le qualifier de dangereux. Ce n'est pas un livre d'Histoire, on le sait. Comme à chaque fois qu'il lit un essai, le lecteur sait qu'on lui propose une vision du monde politisée qui va dans le sens d'une thèse. Comme à chaque fois, le lecteur sait qu'il devra garder un minimum de recul sur le monde et un minimum de bon sens.
La deuxième partie sur l'expansion d'un modèle de soumission et de servitude de la femme envers l'homme, de maternité obligatoire, de guérillas envers les femmes fortes et intelligentes est intéressante, bien sourcée quoiqu'un peu tirée par les cheveux parfois.
J'ai trouvé que les deux parties les plus valides, qui portent le moins à controverse, sont la troisième : sur les femmes célibataires sans enfant et les femmes qui regrettent leur maternité ; ainsi que la quatrième : sur les vieilles femmes. Elles restent beaucoup plus factuelles et analysent parfaitement les pressions sociales qu'elles subissent.
La cinquième et dernière partie est, pour moi, celle qu'il faut prendre avec le plus de pincettes. Elle reste captivante pour les violences obstétriques, qui vous laisseront la bouche grande ouverte devant certaines phrases que des médecins ont osées sortir à leurs patientes ou devant certains abus du système médical et des facultés de médécine. Mais néanmoins, la définition de l'intelligence que donne Mona Chollet, le lien qu'elle fait entre les femmes, la nature et l'écologie, ses propos parfois anti-sciences et anti-progrès (qui se veulent un peu enfouis mais qui sont pourtant bien là) ou la conclusion bizarre où elle revient aux sorcières alors qu'elles ne faisaient plus partie du propos, restent bancals.
Toutefois, Mona Chollet signe quand même un livre fluide, remarquable, sourcé, qui pose plein de questions.