Le propos défendu par Drouar me semble absolument digne d'être soutenu, et mérite assurément d'essaimer davantage dans le discours social. Fervent défenseur d'une ligne wittigienne, je ne peux qu'abonder. Par ailleurs, je partage absolument l'option stratégique défendue - à savoir : il importe de faire exister, sous diverses formes, une critique de l'hétérosexualité en temps que système politique, à en multiplier les occurrences, pour produire quelque effet. J'apprécie beaucoup, enfin, que le développement théorique soit enrobé de fiction (même si je trouve celle-ci assez faiblarde).
Mais.
Il n'y a, je crois, pas tout à fait de quoi faire un livre ici. J'ai eu à plusieurs moments l'impression d'un développement étiré à l'extrême (ce qui implique un certain nombre de redites) pour produire quelque chose qui puisse faire essai. Exemplairement, les statistiques sur le partage des tâches dans le couple (tel que promu par l'hétérosexualité) ont déjà été présentées (souvent mieux) dans 125973 ouvrages féministes. Elles semblent avoir à plusieurs reprises fonction de remplissage. Plusieurs dimensions du régime hétéropatriarcal sont exposées sous forme de listes, demeurent peu ou pas problematisées. Pour avoir entendu l'auteur s'exprimer à quelques reprises, j'ai eu le sentiment de remâcher le plus gros de l'ouvrage.
La dernière partie est sans doute la plus intéressante, qui explore les difficultés internes aux forces de gauche, en pointant l'hétérosexualité comme grand impensé de nombreux développements féministes. J'aurais aimé en lire davantage sur cette question, d'autant que l'auteur semble avoir été en butte à quelques réactions violentes, lors de l'organisation de son festival éponyme. Il me semble que cette expérience aurait pu constituer un excellent prétexte à élaboration.