Oui on peut écrire de la SF sans faire s'affronter des hordes de robots ou des flottes de vaisseaux spatiaux!
L'histoire de Spin se passe sur le plancher des vaches, dans un futur proche qui n'a rien d'excitant si ce n'est qu'on y vivra en compagnie de trois enfants, et par la voix d'un d'entre eux, ni plus ni moins que la disparition des étoiles. La destinée de ce trio sera bien sûr importante dans les décennies qui suivront, leurs vie se croisant sans cesse au gré de la grande histoire.
Cet étalement chronologique peut donner une impression de lenteur à première vue, heureusement largement compensée par le soucis du détail que Wilson apporte à ses personnages pour nous les rendre crédibles et humains, c'est à dire membres d'une espèce littéralement déboussolée, qui persiste à lutter pour sa survie autant par nécessité que par dépit.
Amateurs de retournements de situation shakespearien et d'effets de manche fantasy-esque passez votre chemin : si Wilson nous surprend c'est toujours par l'habileté de sa narration et la pertinence de ses idées. Il passe en revue tous les poncifs du genre avec une virtuosité sans égal, prenant souvent des libertés bien venues. Plus que la science, c'est bien l'humain qui est mis au centre du roman, d'où les nombreuses pages où l'on partage les états d'âme, les sentiments et les doutes du narrateur. Ca sonne toujours juste, mais ça fera grincer des dents les lecteurs SF pure souche qui réclameront invariablement leur quota de cyborg ou de batailles spatiales épiques.
Chose rare par les temps qui courent, Wilson se garde de toute posture moralisatrice et nous laisse le soin de décider du bien et du mal par nous même, finissant de démontrer à quel point il fait le pari d'une SF intelligente, qui respecte son lecteur et ses personnages.
En gommant le plus possibles les références à son époque et en évitant de vouloir faire du neuf à tout prix, Wilson a pris toutes ses précautions pour faire de Spin un roman intemporel. Pari réussit, il signe là un des classiques de la SF contemporaine