Tuer la mère
Un livre écrit dans un français absolument superbe, traduisant à merveille une progression, un basculement, inédit et sans équivalent dans la littérature, de son narrateur à travers un monde fait de...
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le 5 mai 2013
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Quand je pense qu'il m'a fallu attendre l'âge de 25 ans (environ – ce qui est sûr, c'est que je travaillais alors et allais être père) et une opération de fouinage chez un bouquiniste, pour découvrir ce roman et cet auteur, par conséquent. "Comment, tu n'as jamais entendu parler de "vipère au poing" ?" Ma femme n'en revenait pas et avait du mal à me croire. Quand elle m'a eu raconté sommairement le livre, mon sang n'a fait qu'un tour, j'ai acheté puis dévoré le livre. Puis, j'ai continué avec les deux suites "la mort du petit cheval" puis "le cri de la chouette".
Un roman autobiographique ou largement autobiographique dans lequel le narrateur raconte ses relations tendues avec une mère qu'on peut qualifier d'indigne dans un milieu très bourgeois et très conservateur de la campagne angevine. C'est aussi un milieu fermé et catholique au sens où on fait la charité visiblement mais avec condescendance. Eh oui, car on vit chichement sur la dot de Madame, le père n'étant pas foutu de travailler ou plutôt ne trouvant pas de situation à son niveau. Un faible, ce père, sur lequel le narrateur s'appuie sans illusion. Avec mépris.
L'éducation des enfants se fait à travers un abbé qui revient tout de même moins cher que la pension pour trois enfants … Quand l'abbé ne convient plus parce que pas assez sévère ou avec la main baladeuse sur les fesses des servantes, on le vire et on le remplace.
Ce qui caractérise ce roman et enflamme le lecteur, c'est la haine absolue, viscérale du narrateur surnommé Brasse-Bouillon pour une mère qu'on a mariée à un homme qu'elle n'a jamais aimé et qui lui a fait trois enfants "dans le noir", avec dégout.
"Elle avait de jolis yeux, vous savez, cette vipère … que je retrouverais dans les prunelles de Folcoche, je veux dire de ma mère, … "
Cependant, avec le recul des années, je ne peux m'empêcher de penser que le caractère et la personnalité du narrateur devaient beaucoup à la mère. Bazin a sûrement dû avoir un satané caractère dans sa vie ultérieure. Pour s'affronter de cette façon, il faut être semblable, à la manière d'aimants de mêmes pôles.
Hervé Bazin est né en 1911 ; par conséquent son enfance, c'est grosso modo les années 20. Le livre est paru après la guerre en 1948. Hervé Bazin avait donc plus de 35 ans quand il a écrit le roman. Mais on sent encore la fumée de l'encre du stylo avec lequel Bazin écrit. Il devait sûrement régulièrement changer de plume au stylo. (Evidemment, si c'est une machine à écrire que Bazin a utilisée, on doit voir les caractères profondément et rageusement enfoncés dans les feuilles).
Les phrases sont courtes, sarcastiques, efficaces ; "Vipère au poing" était son premier roman. Une sorte de thérapie pour sortir l'image de sa mère de sa tête, pour se guérir de cette violence interne ?
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le 19 juin 2023
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