Que devient la séduction après #MeToo ? L’écrivain et sociologue Maria Pourchet donne une chance aux protagonistes fatigués, Dom Juan contraints de se ranger et femmes libérées au bord du burn-out, d’explorer de nouveaux territoires relationnels, dans une Conquête de l’Ouest d’un nouveau genre.
Séducteur compulsif habitué à user sans vergogne de son aura d’homme en vue, l’acteur Alexis Zagner réalise qu’il vaudrait mieux pour lui se faire oublier s’il veut se préserver de la vague #MeToo. Tel un hors-la-loi échappé d’un western, il prend la route de l’Ouest, direction une vieille bâtisse perdue en plein causse, dans le Lot. C’est précisément là que s’est aussi réfugiée Aurore, une mère célibataire revenue de la vie parisienne et des relations avec les hommes, et qui, arrivée au bout du rouleau, préfère désormais vivre seule mais tranquille.
Dans cette zone blanche à l’écart du tumulte sociétal contemporain, pendant que là-bas, dans ce théâtre qu’est le monde, enfle la tempête médiatique et judiciaire autour d’Alexis et de ses semblables, voilà les deux personnages parvenus « tout au bord du western », cet « endroit de l’existence où l’on va jouer sa vie sur une décision, avec ou sans désinvolture, parce qu’il n’y a plus d’autre sens à l’existence que l’arbitraire. (…) Quelque chose précède toujours dans le western : une logique violemment personnelle et dérisoire, vouée à finir, faite d’ordre et de ville, de liens et d’habitude. Et de dettes. »
Loin du duel où l’un terrasse l’autre, la confrontation commence par le dépôt des armes, l’observation et le dialogue. C’est en déconstruisant chacun leur histoire, en se redécouvrant à travers le regard de l’autre, que cet homme et cette femme réapprennent ce qu’ils avaient oublié : l’amour, débarrassé des jeux de rôle du théâtre social historique. « L’amour est endémique, il repousse n’importe où. On ne dit qu’il est rare que par bonté pour les manants et les secs, pour ceux qui n’ont rien sous la peau. En vérité il est partout, explosif ou rampant. Les incendies c’est lui, la fin du monde c’est lui. »
Déconcertant, parfois cru, toujours décapant dans sa façon de clouer les vérités du monde, ce roman prend une hauteur audacieuse pour un regard à rebrousse-poil sur notre époque. Interrogeant nos dissensions et nos impasses avec clairvoyance, sans jamais excuser ni minimiser, la question magistralement posée par l'auteur est, après la nécessaire vague #MeToo : et maintenant ?
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