Une amie à moi m’avait demandé de lui trouver des mangas, animes, films ou séries traitant de relations lesbiennes. Je ne m’étais jamais vraiment intéressé à ce thème dans les mangas même si je connaissais le terme Yuri qui le désigne (ou Yaoi pour les hommes). C’est donc lors de mes investigations que j’ai pu découvrir Citrus (qui commençait tout juste à arriver en anime). Le style graphique qui se démarque des autres Yuri par son aspect moins Shôjo m’a plutôt séduit car j’aime pas du tout le style de dessin des Shôjo. Je me suis alors dit : « pourquoi ne pas tenter celui-ci vu que j’apprécie les romances ». Malheureusement, je dois dire que je suis assez mitigé sur cette première expérience. Bien sûr on pourra me rétorquer que je ne suis pas le publique visé par ce genre de scénario étant un homme hétérosexuel (et occidental qui plus est) mais je vous garantie que je suis plutôt bon public et assez ouvert d’esprit. Non en vérité cet anime n’est pas si mal, c’est simplement qu’il se contente de peu, trop peu.
Les 2 personnages principaux ne sont pas très développés je trouve. Yuzu, notre héroïne, est une « gal » (comprenez une Nabila à la japonaise) donc une fille plutôt soignée mais superficielle avec un caractère assez fort qui la masculinise un peu et contraste avec son apparence très féminine. Cependant Yuzu va changer au contact de Mei (sa love interest) pour devenir plus mature, sérieuse et responsable puisqu’elles vont devenir sœur après le remariage de leurs parents respectifs. Ce nouveau statut va la chambouler un peu aux vues du caractère « incestueux » de leur relation et de sa responsabilité de « grande sœur ». Les gals n'étant que très rarement représentés dans les animes, j’ai trouvé ce personnage assez original malgré son manque de profondeur. De son côté, Mei est plus dans l’archétype du Yuri, elle est assez peu communicative et n’extériorise pas ses sentiments, grande, charismatique, intelligente et c’est la reine du lycée. Par « reine du lycée » je veux dire meilleure athlète sportive de bahut, déléguée et/ou présidente du conseil de discipline histoire d’appuyer un caractère sérieux qui crée un contraste entre la rigueur morale qu’implique ce poste et le fait d’être impliqué dans une relation (homosexuelle qui plus est). Pour faire court c’est une élève exemplaire et dans le cas présent elle est même la petite fille du directeur de l’école, destinée à prendre sa relève un jour. Pourtant dans le premier épisode Yuzu la surprend entrain d’embrasser un prof. Elles vont donc en parler le soir même et sans dire un mot Mei lui saute dessus pour l’embrasser ce qui déclenche instantanément leur relation. Le lendemain Mei quitte son prof sans qu’on ne comprenne vraiment ce qui l’avait poussé à sortir avec ni ce qu’il s’est passé dans sa tête pour se tourner vers Yuzu.
C’est un peu facile et surtout peu crédible voir même incohérent tant le changement se fait rapidement sans évoquer de quelconques sentiments… Car oui, voilà ce qui m’a le plus déçu dans cette histoire, la question de l’homosexualité ou même des sentiments n’est jamais vraiment abordée, ou très très peu. C’est quand même un comble pour une histoire censé tourner autour de ces 2 éléments, et ce n’est pourtant pas les occasions qui manquent… Du coup le manga s’avère assez creux je trouve, et ne cherche qu’à créer des situations un peu chaude sans jamais vraiment impliquer le spectateur émotionnellement ni tenté de faire passer de message, c’est vraiment dommage. Non pas qu’il faille impérativement tenir un propos sur l’homosexualité mais le minimum serait tout de même d’évoquer les sentiments dans une romance et faire une mise en situation pour que ce soit crédible en donnant de l’intérêt au récit et des enjeux, là y a rien concrètement… J’ai l’impression que, de manière générale dans les mangas Yaoi et Yuri, l’homosexualité n’est jamais évoqué clairement, comme si l’œuvre ne s’assumait pas, comme un propos inavouable que l’on feint d’ignorer pour éviter la censure en plaidant l’innocence. Les consommateurs de ce type d’œuvre sont d’ailleurs majoritairement des hétéros aussi (et en grande majorité des femmes pour le Yaoi) car c’est une vision édulcorée et fantasmée de ce milieu.
Pour ce qui est des personnages secondaires, il n’y a que 2 autres personnages importants qui ne sont guère plus développés et jouent tous deux le même rôle. Vous savez ce fameux rôle de la petite peste immature et faussement amoureuse de l’héroïne qui sera donc une pseudo rivale pour sa moitié. En fait ce genre de personnages est très courant dans les romances en générale, puisqu’il faut bien perturber un peu le couple afin d’amener des péripéties et donner des enjeux émotionnels au lecteur. Ce stéréotype représente aussi un défit pour le membre du couple qui se retrouve en rivalité avec ce personnage. Cela va permettre de le confronter à ses propres sentiments, afin qu’il en prenne pleinement conscience et les fasse mûrir. Le conflit ainsi créé se résout systématiquement avec la « Kôhai » qui « abandonne la partie » (puisque finalement pour elle ce n’était qu’un jeu) en adoubant les sentiments du héro, montrant ainsi symboliquement que ses sentiments sont vraiment forts… Ces 2 personnages secondaires sont donc assez clichés et un peu insupportables du côté de Mei (car je déteste les princesses « Moe »). La kôhai de Yuzu, Matsuri, est un peu plus développé et a un fond étonnamment intéressant pusqu’il est très fortement sous entendu qu’elle se prostitue. Le manga tient donc un certain propos sur la prostitution juvénile mais vue que ce n'est pas le but premier du manga, le sujet est finalement donc à peine survolé.
Cela dit, le manga réussi tout de même son objectif principale qui est de crée une tension sexuelle entre les deux personnages. Si vous attendez un passage à l’acte je vous préviens vous allez être frustré à de multiples reprises, le récit joue beaucoup sur cette frustration (c’est dans cette optique qu’il ne clarifie jamais les sentiments de Mei aussi), et quelque part c’est ce qui est plaisant et nous tient en haleine jusqu’au bout. A part ça pas grand-chose à en retenir, l’histoire n’est pas fini en anime, et n’aura visiblement pas de suite, c’est donc encore plus décevant… Je ne le déconseille pas particulièrement pour autant car il reste regardable, mais bon, à moins d’être un gros fan du genre Yuri ou juste un peu curieux comme moi, cet anime n’a a mon sens rien de transcendant.
Edit : En me renseignant un peu il semblerait qu’au Japon les relations ambiguës entre filles sont relativement courantes au lycée, notamment dans les lycées réservés aux filles comme c’est le cas dans cet anime. Cela n’implique pas nécessairement du sexe ni de l’homosexualité mais simplement un besoin tactile et affectif (dans une société aussi stricte et frustrée). C’est assez difficile à croire quand on connait la pudeur des japonais(e)s mais ce n’est qu’un énième paradoxe de cette société schizophrène…
En bonus, si le sujet vous a intéressé je vous recommande d’aller voir cette vidéo du youtubeur Angry Waifu qui a bien plus de culture que moi sur le sujet et en parle très bien ici :
https://www.youtube.com/watch?v=t1HkuHA2Fes
il conseille aussi des œuvres Yuri dans cette autre vidéo dédiée à ça :
https://www.youtube.com/watch?v=7T4_BORq_LI