Citrus
5.6
Citrus

Anime (mangas) AT-X (2018)

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Citrus, the lemon incest (critique manga et animé)

[ATTENTION CONTIENT DES SPOILERS]


J'ai commencé la série animée Citrus sans m'attendre à grand chose de plus qu'un shoja ai basique, voir un Yuri si scènes de sexe explicites il y avait. Et bien j'ai été surprise. L'animé, ainsi que le manga qui l'a inspiré, respectent les canons du genre mais ajoutent quelque chose en plus, une certaine épaisseur aux personnages qui arrivent à s’élever au dessus du couple duel caractérisé . Souvent dans les shoja ai une jeune fille énigmatique, distante, torturée, généralement plus âgée fascine une jeune timorée, fraîchement arrivée dans la "all girls school". C'est elle qui fait le premier pas et par la bande perturbe la cadette qui se retrouve à questionner son identité, ses convictions etc... On retrouve ce schéma dans des classiques tels que Strawberry Panic ou encore Kannazuki no miko et ça, indifféremment du genre (comédie, drame, fantastique).
Dans Citrus, nous suivons l'arrivée dans un pensionnat pour jeunes fille de Yuzu, une kogaru qui a a dû suivre sa mère alors que celle-ci venait de se remettre en couple avec un nouveau "papa". La première chose intéressante à noter, c'est le choix de faire du personnage principal (celui qu'on suit dès le départ et donc auquel le lecteur/spectateur peut le plus facilement s'identifier) une kogaru, c'est à dire une fille populaire, ouverte, déjà sexualisée dont les principaux intérêts tournent autour de la mode, au lieu de la jeune fille naïve et pure dont nous parlions. Cette caractéristique apporte une nouvelle dynamique au couple duel : la kogaru va d'autant plus être altérée et évoluer au cours de sa relation qu'à la base elle ne représentait pas la partie soumise du duo. Elle peut aussi impacter différemment l'aînée avec son franc parlé, son ouverture et sa personnalité haute en couleur.


Mais Citrus n'est pas un shoja ai traditionnel puisqu'il apporte un élément nouveau à la relation saphique traditionnelle : Yuzu et Mei sont belles-sœurs. Elles doivent alors surmonter un obstacle supplémentaire pour arriver à être ensemble.
Bien évidemment, l'inceste n'est pas présent officiellement, nous ne parlons pas de vrais sœurs (et encore moins de consanguinité). Cependant, enclavée dans ce nouveau statut social, Yuzu ne peut s'empêcher d'adopter le comportement protecteur d'une vraie sœur et par ce fait alimente la dimension malsaine des sentiments qu'elle développe envers elle. Si l'inceste est réprimandé dans la majorité des sociétés, c'est bien pour deux raisons : tout d'abord la possibilité sous-tendue de consanguinité qu'elle génère et qui entraîne un développement dégénérescent de la filiation. Dans un second temps, elle empêche l’extension familiale à travers le mariage externe. Qui dit inceste dit union interne et donc aucune ouverture sur les autres, aucune extension du territoire etc.. Dans Citrus, bien sur, aucunes de ces raisons n'est applicables mais l'éducation reçue, tant au niveau macro (sociétale) que micro (parentale) nous force à rejeter la formulation de ce type de relation déviante. Il est inconcevable de vouloir entretenir une relation amoureuse et sexuelle avec quelqu'un avec qui nous entretenons déjà une relation fraternelle,paternelle ou autre. D'ailleurs, nous tendons même à étendre le schéma familial et donc l'interdit incestueux à des gens que nous connaissons et fréquentons juste depuis notre enfance. Le fameux "tu es comme un frère pour moi" du coup il y a une ligne à ne pas franchir. On ne peut établir deux types de relation avec la même personne (c'est très bien illustré dans le film de 1997 Lolita, réalisé par Adrian Lyne, dans lequel Humbert Humbert est confronté à sa belle-fille Dolores qui, alors qu'elle l'aguiche lui demande son argent de poche, le renvoyant à sa posture paternelle incestueuse). Dans Citrus, Yuzu n'arrête pas d'attester vouloir être une bonne grande sœur mais se retrouve à céder à ses sentiments, ce qui la clive et donc travaille à la construction d'un personnage complexe.


Mei, de son côté, n'est pas en reste. Elle respecte beaucoup plus les caractéristiques de l'aînée ( sauf que c'est la cadette) mystérieuse, distance, manipulatrice et torturée. En effet, son père, a qui elle portait une admiration sans faille, a été absent pendant des années, la laissant seule avec un grand-père autoritaire et une volonté acharnée de protéger et reprendre les rennes de l'école (il faut préciser qu'elle est la petite fille du "Chairman" de l'école). Quand son père revient, totalement changé et déresponsabilisé (baba-cool qui voyage tout le temps), elle se sent trahie. Ce ne sera que grâce à l'aide de sa nouvelle sœur qu'elle arrivera à s'éloigner un peu de cet héritage pesant et à s'ouvrir socialement. Car, à la base, Mei est ce qu'on pourrait appeler une "handicapée émotionnelle". Alors oui elle a beaucoup de gens autour d'elle dû à son statut de présidente du conseil étudiant, mais elle semble toujours vide à l'intérieur, incapable de réagir correctement aux sentiments, aux réactions des autres. Cela s'illustre parfaitement quand elle entame un jeu de chat et de souris avec Yuzu, allant jusqu'à l'embrasser de force pour ensuite mieux la rejeter. Mais c'est à ce moment là que la personnalité de Yuzu apporte un dynamisme à la série. Cette dernière ne se laisse pas faire et fait tout ce qui est en son pouvoir pour rééquilibrer leur relation, calmer Mei et instaurer un climat de confiance entre elles. La personnalité de Mei reste quasiment insondable, ce qui provoque des prises de tête à Yuzu. Mais tout de même au fur et à mesure que l'histoire évolue, Mei s'ouvre émotionnellement .


J'ai beaucoup apprécié leur premier "date" organisé car il fait vraiment ressortir toutes les névroses sociales de Mei. Cette dernière décidé d'utiliser le journal du parfait rendez vous que Yuzu a crée pour s'amuser, et de le suivre à la lettre. Nous la voyons alors suivre chaque étape de façon robotique sans émotions, laissant une Yuzu dépitée. Ce passage montre bien le pont qui sépare les deux jeunes filles. Bien que Yuzu n'ai jamais eu de relations amoureuses, elle est beaucoup plus ouverte aux émotions. Mei n'a jamais connu de relations stables et ne s'est jamais autorisé à se laisser aller en dehors du travail. Tout doit donc être minutieusement calculé pour pas qu'elle ne se sente perdue.


Bon je n'en suis qu'à l'épisode 3 de l'animée qui vient juste de sortir en France et je crois qu'il me reste quelques chapitres du manga à lire. Du coup j'aurais l'occasion de revenir pour agrémenter ma critique.


En tout cas si vous avez un peu de temps, n'hésitez pas à aller voir le manga (disponible en scan en ligne) dont les planches sont franchement dynamiques et l'animé (les trois premiers épisodes disponibles sur youtube) !

Speculoos93
7
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Créée

le 21 janv. 2018

Critique lue 5.2K fois

8 j'aime

2 commentaires

Solweig Cicuto

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8
2

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