Je n'avais jamais entendu parler de Luka Rocco Magnotta, escort-boy et acteur porno qui s'est trouvé une vocation en s'autoproclamant "premier tueur sur internet".
Don't F..k with Cats pose donc les bases d'un true-crime parfaitement ancré dans la réalité de la génération 2.0 et de l'hyper-connexion. Chronologiquement, nous suivons d'abord les quelques internautes ayant croisé la route du psychopathe en ligne. La plongée est rude, glaçante tant l'empathie pour ces messieurs/mesdames-tout-le-monde qui se retrouvent face aux vidéos de torture de Magnotta.
Puis la traque commence, à l'instar d'un thriller à twist. À ceci près que les participants ne sont plus policiers mais simples citoyens derrière leurs écrans. Il y a quelque chose de touchant mais déstabilisant dans la démarche.
En ouvrant les vannes d'un réseau de communications pour relier les gens et partager la culture, c'est la chance de révéler l'altruisme de tout un chacun. Mais aussi la porte ouverte au pire de l'âme humaine. Vint alors la question insoluble : qui fabrique qui ?
Le documentaire attend la fin pour vriller sur lui-même et adresser cette question aux spectateurs. C'est un peu dommage car elle se posait dès le début. Don't F..k with Cats reste prenant, choquant et émouvant. Il se révèle même édifiant sur le questionnement autour du pouvoir d'action et de nuisance d'un outil social qui fabrique les instruments de sa destruction. Je reste cependant circonspect devant certains choix narratifs.
Pourquoi ne pas avoir consacré une partie toute entière à Luka Magnotta ? On a bien des aperçus de son passé, mais tout cela reste trop en surface malheureusement. Il y avait pourtant matière à rendre sa destinée encore plus horrible en contant à rebours les évènements qui y ont mené. Faute de mieux, on devra se contenter d'un "résumé" de sa vie assez sommaire, néanmoins instructif sur la psyché dérangé de Magnotta.
Autre point gênant : le fait de le traiter comme un pur thriller au présent, en déroulant un suspense parfois douteux alors qu'un ton plus factuel et distant était plus à-propos selon moi.
Quoiqu'il en soit, si vous êtes un inconditionnel du genre, sachez que celui-ci est parfois limite insoutenable, et moralement discutable. Pour les bonnes comme les mauvaises raisons.