"Don't be defeatist dear, it's very middle class"
J’attendais avec impatience de commencer cette série car je suis une grande fan des « period drama » comme disent nos amis anglais. Toutes ces robes, ces gants, ces queues de pie, ces tasses de thé, ces manoirs gigantesques, ces maîtres et serviteurs, ce flegme et cet accent anglais, moi ça me fait tourner la tête. C’est vrai quoi, qui n’a pas un jour rêvé de se faire appeler Lady, surtout dans un monde où le respect d’autrui se fait désormais rare…
La saison s’ouvre sur le manoir de Lord Grantham, Downton Abbey, où les serviteurs s’agitent pour allumer les feux dans les cheminés et ouvrir les fenêtres avant que les habitants ne se réveillent et ne les « sonnent » (sérieux c’est pas génial ce système de cloche ?). Donc voilà, le petit déjeuner s’installe, on découvre les filles du Lord, Mary, Edith et Sybil, et puis soudain un télégramme arrive : les héritiers et cousins du Lord sont morts dans le naufrage du Titanic. Toute cette saison va donc être centrée autour de l’arrivée du nouvel héritier, Matthew, un avocat de la classe moyenne, et de la question de l’héritage. En tant que fille, Mary n’hérite rien de son père, pas même sa fortune, qui se trouve pourtant provenir de la dote de sa mère, une américaine qui a eu le droit, elle, à un héritage.
La grande force de cette saison, en plus d’avoir une direction artistique sublime (décors, costumes, musique et acting), c’est son script. Tout est au poil, contrôlé, juste. Les dialogues sont magistraux, et si la série s’était arrêtée à la fin de ces 7 épisodes, je n’aurais rien regretté. Cette saison 1 est tout simplement un chef d'œuvre.
Enfin si, j’aurais surement regretté la reparti de la comtesse douairière, jouée par une Maggie Smith au meilleur de sa forme. Elle apporte une touche d’humour, et à chaque fois je me demande si elle le fait exprès ou bien si ses remarques sont involontairement géniales. En tant que comtesse douairière, elle est assez vieux jeu, elle ne sait pas ce qu’est un week end et méprise l’électricité, mais elle semble se promener au milieu de ses descendants avec une telle omnipotence, c’est remarquable. Elle s’investit dans tous les problèmes et est finalement beaucoup plus tolérante et romantique que ses airs peuvent laisser le penser. Maggie Smith all the way donc.
L’autre personnage que j’aurais sans doute regretté, c’est Lady Mary, la fille aînée. Je pense que c’est le personnage qui montre le plus de facettes et de profondeur cette saison. C’est une belle jeune femme, au teint pâle et à l’attitude hautaine, qui se montre souvent quelque peu cruelle, surtout avec sa sœur cadette Edith, beaucoup moins gâtée par la nature. Mais au-delà de ça, on devine rapidement que ce n’est qu’une façade que se donne Mary pour répondre aux attentes qu’exigent son rang et son éducation. Comme sa grand-mère, elle a une réparti qui fait mouche et ses répliques sont du petit lait pour le spectateur. Pour ne rien gâter, Michelle Dockery a une voix de velours et une stature d’aristocrate parfaite, non vraiment j’adore Lady Mary. Je développerai cela plus loin, dans mes commentaires avec spoilers.
Les seconde et troisième saisons sont hélas de moins bonne facture. Et c’est d’ailleurs le danger qui guette toutes les séries dont la première saison est si bien. C’est comme quand on fait une suite à un film génial, on n’atteint jamais vraiment le même génie. Les intrigues secondaires sont trop nombreuses et surtout parfois insignifiantes. J’aurais préféré que le script se cantonne aux personnages que l’on connaissait déjà plutôt que d’en rajouter de nouveaux dont on n’a strictement rien à cirer. Et puis, je ne sais pas si c’est parce que la seconde saison se passe pendant la première guerre mondiale, mais tout le monde est trop indulgent! Certes c’est la guerre et c’est triste, mais quand même. La troisième saison s’avère meilleure que la seconde à mon avis, mais la bombe scénaristique finale me fait me demander dans quelle direction va aller la quatrième. J’ai mes petites théories mais bon…
La série est aussi une belle analyse de la situation féminine de l'époque, offrant ainsi de magnifiques rôles féminins et ce n'est pas pour me déplaire. Cela me fait penser à Mad Men, dans le sens où on a affaire dans les deux cas à des milieux machistes, mais où les femmes combattent leur situation, ou du moins les dépassent. Lady Mary a beau se targuer d'être une aristocrate, pleine de dédain pour la classe moyenne, il n'empêche qu'elle repousse ses prétendants et s'obstine à faire ses propres choix. Sous ses airs froids elle recherche la passion. Elle sait que le monde change, et elle ne sera pas la dernière à s'adapter. Lady Sybil, la plus jeune des sœurs, est la "révolutionnaire" de la famille. Même si son personnage n'est pas aussi exploité que Mary, elle représente l'esprit de rébellion de la jeunesse anglaise. La comtesse douairière, sous ses airs conservateurs et offusqués, sait bien qu'une femme doit se battre pour sa condition, et admets volontiers que " l'aristocratie n'a pas survécu grâce à son intransigeance". Certaines servantes, à l'image de Gwen et Ethel, remettent en question leur statut, rêvant d'un destin meilleur et espérant que la guerre fasse tomber les barrières définitivement.
Lord Grantham remarque à un certain moment et sans ironie que les "femmes sont plus fragiles que les hommes", or il serait bien surpris de voir que ce ne sont pas elles qui seront perdues face aux changements sociaux. Je dirais même que notre cher Lord me fait un peu pitié dans la saison 3, quand il cherche désespérément à se raccrocher au passé...
Au-delà de ça, l’ensemble de la série reste de très bonne qualité, en tout cas j’ai tellement aimé la saison 1 que je ne pouvais pas me résoudre à mettre moins de 9. A noter l’apparition de Shirley MacLaine dans la saison 3, en tant que la mère de Lady Grantham, une riche américaine donc. Je dois dire que rien que pour la confrontation avec Maggie Smith, cette saison vaut de l’or.
*spoilers*
Saison 1 et 2 : Comme je le disais c’est le personnage de Mary qui m’a le plus intriguée. Elle a des apparences de femme froide et arrogante mais elle laisse des indices qui démontrent le contraire, comme lorsqu’elle s’excuse auprès de Bates quand elle explore les greniers avec le Duc. Elle explique à ce dernier qu’elle s’excuse quand elle est en tort, et cela montre qu’elle n’en a pas rien à faire des autres, elle s’inquiète et les respecte. J’aime bien sa relation avec les domestiques, notamment Anna et Carson, les seuls qui la connaissent vraiment finalement, avec Matthew. Et puis comment oublier ce cher Mr Pamuk, preuve que Mary cache des envies pas très chrétiennes, mais aussi qu'elle les assument puisqu'elle ne souhaite rien cacher à Matthew et être honnête.
De même, quand il ramène Lavinia (la pauvre, elle a une storyline des plus risibles franchement), Mary ne cherche pas à se débarrasser d’elle, elle respecte le choix de Matthew, même quand elle a l’occasion de la démonter avec le scandale politique. Alors après on peut se demander, mais où est passé le mordant dans tout ça ??! C’est vrai que personnellement j’ai un peu regretté ses tirades arrogantes mais au moins l’évolution de son personnage était bonne et cohérente, c’est elle qui m’a tenu pendant la saison 2. Le talent certain de Michelle Dockery n'est sans doute pas étranger à ce fait... Elle rend les répliques les plus mielleuses complètement plausibles.
Parce qu’à mon avis il ne fallait pas compter sur Matthew, son personnage fait des choix qui m’ont enragé. D’accord, il a le droit de préférer Lavinia à Mary (mais bon…) mais qu’après il ne vienne pas la blesser avec des « je suis désolée, je ne pouvais pas la larguer vu qu’elle est restée quand j’étais handicapée, c’est toi que j’aime mais j’ai mon honneur à maintenir, elle a besoin de moi ! » Déjà, c’est très paternaliste envers Lavinia et en plus, c’est Mary qui s’est occupée de lui quand il était dans sa chaise! Il m’a vraiment exaspéré. Et puis alors, pauvre Lavinia, obligée de mourir en martyr, provoquant un sentiment de culpabilité chez Matthew qui le fait jusqu’à dire que Mary, comme lui, ne mérite pas le bonheur… Pardon? Le gars passe tout le dernier épisode à arracher Mary aux griffes de Carlisle et après il dit qu’elle ne mérite pas le bonheur ?....Enfin bref… J’aurais des tas de choses à dire sur lui mais je sens que je vous exaspère déjà.
L’autre personnage qui m’a un peu énervée c’est Edith. Pourquoi est-ce qu’elle ressent systématiquement le besoin de se jeter dans les bras du premier homme qui lui montre un peu d’intérêt? Le vieux Strallan, le fermier, le soldat Patrick… Alors quoi, les filles moins belles doivent revoir leurs standards ??
Je vous le dis, heureusement que j’aime le drame parce qu’avec la dose que nous a servi la saison 2… Le drame et la classe des costumes bien sûr… Et puis soyons honnêtes, j'étais tout de même bien engagée dans la série..
Saison 3 : Bon là je serais brève, il y a encore des défauts, comme ce faux révolutionnaire de Branson par exemple, mais rien d’aussi révoltant que la saison 2. Mary recommence à se moquer d’Edith donc tout va bien! Et puis que dire de la fin, même si on s’y attendait tous cela va quand même provoquer un gros trou dans le fil principal de l’intrigue ! Moi j’aimerais bien que la saison 4 envoie Mary aux States. Et surtout, j’espère que les scénaristes ne vont pas la rapprocher dangereusement de Branson. S’ils font ça j’arrête de regarder, je le jure. Mais bon, je ne pense pas qu'on en arrive là...
P.S: Non pas que cette remarque soit utile mais je préfère largement les coiffures des années 10 à celles des années 20!
Edit : Nouvelle saison dans un mois!! Apparement pas de States pour Mary, mais pas de rapprochement romantique avec Branson non plus, donc tout va bien.
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