On m'a offert la première saison en 2017
Peu habitué des séries télé et n'ayant jamais entendu parler de cette série, je me suis lancé dans cette première saison avec curiosité et un peu d'appréhension. Puis, captivé (accro ?) par les personnages, les décors, les toilettes, l'ambiance bref par un monde dont j'ignore absolument tout, j'ai poursuivi de proche en proche par acquérir les saisons suivantes jusqu'au film (conclusion ?) de 2019.
Que retenir en quelques mots de ces six saisons ? D'abord un monde complètement fermé, en vase clos, hyper hiérarchisé en pleine évolution du fait de la première guerre mondiale qui rebat les cartes.
L'aristocratie de titres, de grosses propriétés foncières s'affaiblit inexorablement au profit d'une autre aristocratie (possiblement une haute bourgeoisie) basée sur les affaires.
Les revenus fonciers déclinent et pour maintenir le train de vie – somptueux -, il devient nécessaire de faire des coupes sombres, de restructurer, de mécaniser, de supprimer du personnel dans la douleur…
Mais, peut-être plus important, la guerre induit une libéralisation des mœurs tant au niveau des maîtres que des employés de maison. On verra la fille cadette, par exemple, épouser le chauffeur, un roturier, d'origine irlandaise (ce qui est tout dire en Angleterre). En plus, il est de gauche et participe au mouvement indépendantiste. La pilule va être dure à avaler.
De la même façon, on verra une domestique chercher à s'émanciper pour devenir une secrétaire salariée. Ou un domestique s'instruire en cachette pour devenir instituteur.
Ce qui est tout-à-fait fascinant dans cette série, ce sont les personnages.
N'ayant pas peur des mots, avec mes yeux actuels, les aristocrates, les maîtres, apparaissent tout-à-fait infects. Sous couvert d'un paternalisme et d'un monde très protecteur et très protégé, les domestiques sont maintenus dans un état de sujétion assez incroyable.
La rigide comtesse douairière Lady Crawley (excellentissime Maggie Smith) se veut être la gardienne des traditions mais s'arrange, avec un jésuitisme consommé, lorsqu'il faut composer tout en gardant la main. La bataille pour conserver le pouvoir sur l'hôpital local, alors qu'elle est complètement dépassée en est un excellent exemple.
Le comte de Grantham, Robert Crawley, son fils, est lui aussi d'une rigidité morale sans faille (sauf quand ça l'arrange) : il est prêt à tout, notamment pour marier sa fille ainée et conserver le domaine dans la famille.
Justement, la fille aînée, la glaciale Lady Mary (Michelle Dockery) d'un mépris sans bornes pour tout ce qui n'est pas elle, est désagréable et rarement sympathique. D'ailleurs, sa cuistrerie lui jouera des tours.
Mais le pire n'est pas du tout là : ces mêmes domestiques sont maintenus d'une poigne de fer par ce que j'appellerai (faute de mieux) les contremaîtres, les domestiques en chef. Aucune pitié de la part d'un "Carson" (excellent Jim Carter) ni même Mrs Hughes (Phyllis Logan) qui finira, d'ailleurs, par s'humaniser par la suite. Comment aussi qualifier le comportement de Miss Patmore, la cuisinière en chef face à ses aides ?
Et des rivalités, des jalousies, des croche-pied méchants sont monnaie courante entre les domestiques eux-mêmes, pour tenter de passer devant l'autre, pour monter en grade, etc…
Comme on sait, il y a deux méthodes pour s'élever dans la société, soit par sa propre valeur mais c'est très difficile; soit en écrasant les collègues...
Thomas Barrow (Rob James-Collier) et O'Brien (Siobhan Finneran) excellent à répandre la calomnie voire à comploter…
A l'exception du couple de domestiques Anna et John Bates (Joanne Froggatt et Brendan Coyle) à qui il arrivera les pires outrages, il y a très peu de domestiques qu'on peut qualifier de franchement sympathiques.
Au final, cette série s'est révélée horriblement délicieuse, terriblement attachante, incroyablement fascinante et donc tout-à-fait vraiment passionnante !