Parmi les points positifs, citons que la série est prenante et agréable à regarder. Ce qui la gâte au point de la rendre franchement dérangeante est sa fin, donc SPOILERS AHEAD.
Ici vous pouvez spoiler !
Si les premiers épisodes soulèvent quelques interrogations, le dernier concentre l'essentiel du problème. Nous l'avons vu entre amis, et ne cessions tous de nous demander quand l'épisode allait enfin révéler qu'il s'agissait entièrement d'un rêve. En vain.
Si on se prend à être heureux que tout finisse si bien (trop bien...), il reste un arrière goût amer, celui laissé lorsqu'on se bâfre contre toute raison à Noël. Il n'y a pas de mal à se faire du bien, toujours est il qu'on en est quitte pour une bonne crise de foie le lendemain. La réécriture des USA années 50 vire de l'hyperbole à la science fiction, voire carrément l'hallucination ou peut-être plus grave: l'hypocrisie. Les émeutes de Stonewall aux revendications beaucoup plus timorées n'auront pas lieu avant 1969, le mouvement des droits civils doit encore un peu attendre, et la mouvance #metoo la fin des années 2010. En dépit de tous ces anachronismes, on n'hésite pas à nous montrer des personnages qui bravent l'ordre établi (qui apparemment n'en demandait pas davantage pour vaciller). Mais Rock Hudson n'avouera son homosexualité que sur son lit de mort, le premier président de couleur élu sera au prochain millénaire, quant à la défense des victimes de harcèlement, le changement social n'est pas aujourd'hui encore abouti.
Tout cela achève de tuer le potentiel qu'avait la série. Plutôt que de délivrer une analyse pertinente de la psyché américaine de l'époque, de ce qui constituait le blocage institutionnel du racisme, de comment et pourquoi l'idéal blanc hétéro était le seul envisagé, on a droit à une réécriture manichéenne, sentimentalisme et franchement fantaisiste de l'industrie du cinéma. Comme si tout ce qui manquait pour que le progrès et le "bien" triomphent instantanément, c'était le courage d'une poignée de rétro SJW d'avancer devant les projecteurs. On se demande alors comment cela se fait que Trump soit au pouvoir dans ce pays, et que la tectonique idéologique ait avancé si lentement. Finalement, le manque de nuances du propos et sa vacuité finissent par lui desservir.
Secondaire mais révélateur, le traitement du thème de la prostitution dans la série. En premier lieu, glamorisée à l'excès (on a tout au plus droit à quelques réserves morales du héros): moyen efficace et facile de lever des fonds en un rien de temps tout en étoffant son réseau, puis à la toute fin on voit le personnage de Rock brisé, incapable de pardonner les abus de son agent en repentir, subitement devenu l'incarnation du prédateur sexuel.
Finalement, le propos force un happy ending jouissif mais terriblement plat, et dangereusement creux et auto-contradictoire.