Ce qui frappe d'abord dans cette série, c'est bien sûr qu'elle résume toute la bien-pensance américaine contemporaine, telle que Netflix nous la sert à grandes louchées. Pas de doute sur l'identité des méchants et des bons, ni d'ailleurs de subtilité excessive dans l'étude des caractères. Les leçons de morale sont tellement lourdes et insistantes qu'elles risquent d'ôter toute envie de revoir cette série, ou de s'intéresser à ses suites éventuelles ou encore aux autres travaux de l'équipe. Il est inévitable qu'avec toute cette idéologie, les anachronismes soient nombreux : les Américains sortis de la seconde guerre mondiale pleurent et larmoient comme des Liberals contemporains, ça s'embrasse et s'étreint à tout bout de champ et les démonstrations masculines de sensiblerie, le langage employé et les manières, sont clairement des plaquages actuels sur un passé qui n'a rien à voir. On passera sur les naïvetés qui se rencontrent fréquemment : apparemment, contre les Méchants en arrière-plan, toutes les minorités vertueuses font un front commun et résistent héroïquement. Noirs, Asiatiques, homosexuels, femmes féministes, s'entendent à merveille entre eux, ce qui prête plutôt à rire.
Malgré ces lourds défauts, qui peuvent gâcher tout le plaisir, cette série a ses beautés : des acteurs splendides, des costumes absolument ébouriffants, des décors reconstitués avec minutie, goût et talent (surtout les intérieurs), enfin un art consommé de la narration filmique, du suspense et du coup de théâtre. Hollywood y déploie toutes ses séductions, c'est vraiment un Dreamland, un pays des merveilles qui se donnent à voir ici. En d'autres termes, sous le voile des bons sentiments démocrates et progressistes, c'est encore Hollywood qui fait son propre éloge et se fantasme un passé imaginaire.