Sous le sujet éculé du projet gouvernemental secret destiné à u(tili)ser des soldats jusqu'à la moelle, se cache en fait une mini-série jouissive à plusieurs titres.
Les acteurs, d'abord, sont impeccables; Julia Roberts reste à distance prudente de ses sur-interprétations habituelles (mais j'imagine qu'elle n'a pas été payée 14 millions de dollars pour ce rôle); mention spéciale à Chris Cooper (deuxième saison), cet acteur beaucoup trop rare et toujours d'une justesse hallucinante. Janelle Monae porte la deuxième saison sur ses épaules.
La mise en scène, ensuite, est plus subtile qu'elle ne le laisse paraître; l'utilisation des split-screens se fait intelligemment et en douceur, nous évitant ces sempiternelles et frustrantes conversations téléphoniques vues d'un seul côté. Idem pour les trois formats d'image, qui permettent à la fois de nous situer dans le temps.. et de nous perdre dans la mémoire !
J'ai particulièrement apprécié un détail anodin mais plaisant; à savoir, le fait que les interruptions (sonneries, coups à la porte, serveurs qui prennent les commandes..) ont toujours lieu à des moments agaçants, pas du tout "on cue", donc imprévisibles et naturels.
L'intrigue, quant à elle, est savamment déconstruite; la dose de révélations est millimétrée comme un médicament dangereux (ce qui tombe bien, puisque c'est l'un des sujets du récit). Les résonances dans la deuxième saison avec la première fonctionnent à merveille.
Mais ce qui m'a le plus estomaqué dans Homecoming, ce sont les ambiances musicales. Car toutes sont en fait extraites de films fameux. Je n'ai pas pu repérer tous les emprunts à d'autres musiques de films, bien sûr, mais j'ai reconnu au moins Shore, Morricone, Donaggio, Hermann, peut-être Alex North, et même, à un moment incroyable, un court extrait de.. New York 1997 (d'Alan Howarth et John Carpenter), qui m'a fait exploser de rire. Il y en a d'autres, et je pense qu'on peut comparer toute la série à un énorme blind-test; peut-être à faire entre amis? (Les génériques n'indiquent aucun compositeur, même s'il y a une superviseuse de la musique; je ne sais donc qui est responsable de ce choix artistique incroyablement maîtrisé; c'est là, à vrai dire, un des plus beaux et discrets hommages qu'on puisse faire à de grands prédécesseurs, mieux encore que d'appliquer leurs leçons de mise en scène).
Bref, une belle surprise (surtout venant d'Amazon, dont la seule autre série valable à mes yeux reste The man in the high castle, et encore, seulement les deux premières saisons) !