La fin justifie les moyens, parait-il. Voilà bien un adage chevillé au corps de notre ami Frank Underwood.
Les trois premières saisons racontent l'ascension d'un élu démocrate dans l'appareil d'état américain. La première année commence avec l'investiture du président Garret. Ce même président avait promis une place prestigieuse à Frank Underwood, en échange de son soutien. Une fois élu, il n'honorera pas sa promesse. Une grave erreur ...
Cette désillusion semble initier l'entreprise de vengeance d'Underwood. J'aime à penser néanmoins qu'il gardait son plan machiavélique bien au chaud dans ses entrailles, prêt à sortir à la moindre occasion. Superbement intelligent, il manipule son monde avec une aisance et une froideur redoutable. Il n'y a pas une once d'idéologie dans cet homme, seul le pouvoir compte. Il y a longtemps qu'il s'est assis sur ses principes pour voir plus haut, plus loin que tout le monde. Il se moque éperdument que son ombre puisse gêner son entourage. Leurs aveuglements ne lui sera que plus profitable.
Si Frank Underwood remplit l'écran sans vergogne, sa femme brille également dans l'arrière-plan. Elle est même probablement le personnage le plus intéressant de cette série. Elle a embrassée depuis longtemps la carrière de son mari, mais si lui semble dopé par le pouvoir, Claire Underwood laisse entrevoir les bribes d'une humanité enfouie. L'empathie et la compassion semblent encore vivre en elle et cela portera préjudice à Frank Underwood. Bien sûr, elle est loin d'être une sainte et porte une ardoise remplies de manigances, mais cette dualité réelle apporte une touche d'imprévisibilité dans la vie de se couple et par conséquent dans le déroulement de la série.
Outres nos deux arrivistes, les rôles secondaires arrivent à dire quelque chose aussi. C'est dire s'ils sont bien écrit tant les Underwood vampirisent l'attention. Du simple garde du corps au président russe, ils ont assez d'épaisseur pour apporter les touches finales d'un portrait de la politique américaine à la fois effrayant et fascinant. Un des personnages les plus marquant est notamment le cuisinier, Freddy, auquel Underwood rend visite très souvent. Un petit restaurant, à la devanture fatiguée et décrépie. Il paraît qu'on y mange les meilleurs «Ribbs» de Washington, enfin c'est ce qu'il raconte car on sent bien qu'il y va pour autre chose. Ce cuisto semble être le seul homme pour qui Underwood attache un réel respect. Il le regarde droit dans les yeux, lui , pas en plongée. Freddy est pourtant son exact opposé. Pas de double discours dans cet homme, il n'essaye pas de séduire ou prendre le dessus, il ne se fatigue pas à tirer du profit d'une quelconque situation, un homme simple et vrai. Je crois que quelque part, Underwood l'admire profondément.
Après vient la forme. L'image est très belle. Un style épuré, froid, qui va à l'essentiel. On pense évidemment à du Fincher, d'ailleurs à la baguette dans les premiers épisodes de la saison 1. Mais la véritable trouvaille de cette série tient dans les apartés qu' Underwood fait avec nous. Le temps s'arrête et il brise le quatrième mur pour mieux dicter sa pensée. D'un cynisme absolu, cette idée géniale permet aussi d'expliciter les tenants et les aboutissants d'un système politique parfois ardu pour le spectateur.
Si je devais émettre une petite fausse note, la saison trois me semble être plus poussive que les deux premières. Est-ce par le fait qu 'Underwood est arrivé au sommet de son édifice et qu'il n'a plus d'appétit pour dévorer ses sous-fifres ?
Ces trois années du rêgne d'Underwood premier sont en tout cas passionnantes à suivre. On se complaît sans remords dans cette illustration peu reluisante de la politique. Reste à voir si les dents d'Underwood peuvent encore rayer le supposé blanc immaculé de la Maison Blanche.
PS: le titre est issu d'une réplique du film « L'associé du diable ».