Des nazis, des flingues, Al Pacino, de la violence décomplexée, il faut bien l'avouer, Hunters a tout pour me séduire. C'est donc avec hâte que je me jetais dessus. Et le moins qu'on puisse dire, c'est que je me suis senti gâté. Pourtant, cette première saison semble diviser. Alors que le spectateur lambda a globalement partagé mon enthousiasme, les critiques l'ont descendu en flèche...
Commençons par ce qui fait consensus. Al Pacino est excellent, cela personne n'osera le nier. La reproduction des années 70 est globalement très propre. De même, la mise en scène se révèle très efficace. Cette dernière permet de donner un rendu parfois cartoonesque, notamment lors des scènes de castagne. Toutefois, elle peut pencher aussi vers du réalisme, très clinique.
C'est d'ailleurs ce qui divise ; la série ne cesse de faire le grand écart entre les années 70, théâtre de bagarres comiques et d'humour en opposition avec les années 40 dans les camps de concentration. Ainsi, nombre de spectateurs se sont retrouvés gênés par ces différences de ton, jugeant certainement que la Shoah ne peut être abordée par bribes fictionnelles, noyées dans une histoire pop. Toutefois, c'est là qui réside la véritable force de la série ; alterner les scènes, naviguant entre la lourdeur émotionnelle des camps et la légèreté relative de la traque des nazis. Qui n'a pas esquisser un sourire devant un nazi exécuté de sang froid ? La Chasse a avant tout une fonction cathartique par rapport à l'horreur des camps.
Comme pour appuyer ces critiques, le Memorial de la Shoah a jugé "dangereuse" la série et notamment une scène de torture perpétrée par les nazis dans les camps. Ils accusent même Hunters de tendre vers le négationnisme (!). Toute fiction en relation avec les camps est-elle mal-venue ? Ne peut-on pas inventer d'histoires en relation avec ce génocide ? On peut évidemment comprendre les arguments de ceux qui jugent cette série comme à côté de la plaque, voire néfaste. Toutefois, je reste persuader que Hunters est un bon medium pour évoquer l'horreur. Il n'y a, en effet, aucune ambiguïté, concernant le sort des millions de juifs. Jamais la série ne présente de doutes vis à vis du rôle des nazis, quitte à développer des méchants caricaturaux.
Il ne faudrait pas oublier que cette série n'a pas vocation à être un documentaire. Si des évènements historiques sont évoqués, ils n'ont pour but que de pousser le spectateur curieux à se renseigner, notamment à propos de la NASA. Et même si l'on peut admettre que les scènes dans les camps sont parfois trop longues, Hunters n'en reste pas moins une série B, assez finement dosée, qui n'hésite pas à utiliser l'humour pour désamorcer le malaise. L'humour noir n'est-il pas le meilleur moyen de faire abstraction de l'inacceptable ? Regarder Hunters, c'est, avant tout, jongler entre les émotions, du rire honteux à l'effroi. Rien de choquant à cela, seulement un coté provoc' assumé.
Au delà de ces questionnements sensibles, force est de constater que Hunters s'inscrit, à l'image de The Boys, dans une démarche irrévérencieuse. La place de la violence a le mérite de questionner nos rapports à l'Histoire ainsi qu'à la morale. Ainsi Hunters explore, de manière moins manichéenne que The Punisher, la légitimité du meurtre et ce, jusque dans son épisode final. On retrouve évidemment les problématiques propres aux super-héros, concernant la justice. Et c'est là que se cache le véritable message de Hunters ; une vive critique des Etats-Unis et du traitement que subissent les minorités. Alors que les plus pauvres n'ont aucun moyen d'être entendus par les autorités, les nazis occupent les plus hautes responsabilités. Ce n'est pas un hasard si les chasseurs sont tous issus de minorités... La touche Jordan Peele, quoi !
Pour conclure, Hunters est une très bonne série sur le plan du divertissement qui soulève des problématiques pour le moins intéressantes. Il ne faudrait toutefois pas se méprendre et l'estimer comme un documentaire sur la Shoah !