"When it comes to livin', dyin' is the easy part"
Pourquoi?
Pourquoi autant de travail quand on sait pertinemment que la série n'aura pas de succès chez le grand public?
Carnivàle nous donne dans la première saison une impression de gros bordel mystique avec des apparitions incompréhensibles, des références bibliques désuètes et des discours stéréotypés mais néanmoins originaux. La seconde saison ne reste pas moins "space" mais au moins une once de cohérence y apparait.
Et, justement, le voilà le problème. A force prononcer dans sa tête "WTF...?" 7 fois par épisode, on comprend bien que certains soient gavés par tout ces champs de maïs sombres, ces tranchées infestées d'ours en gilet rouge, ces pouvoirs glauques et ses couples improbables. L'histoire ne plait déjà pas à tout le monde, et ce sac de paraboles christiano-pagano-sataniques n'arrange pas les choses.
Cependant, Carnivàle nous offre une vision du manichéisme originale qui ne cesse de se remettre elle-même en question. Le parallèle entre la troupe de forains et la congrégation de frère Justin Crowe reste très distant jusqu'au début de la saison 2 mais permet d'éviter de trop s'ennuyer avec l'un ou l'autre, en plus d'être nécessaire à la lente progression de l'intrigue.
La série en profite pour dépeindre un tableau des années 30 aux États-Unis fidèle et absolument pas assommant; en témoignent les décors, les références aux acteurs, politiciens et sportifs aussi nombreuses que pertinentes, et les musiques de tourne-disques qui égayent autant la troupe que le téléspectateur.
On sait bien que la série ne comporte que deux saisons: Pas assez d'audience (c'est expliqué plus haut) et budget trop élevé: ça parait presque un euphémisme quand on voit les effets spéciaux, les acteurs des "phénomènes de foires" qui l'auraient réellement été s'ils étaient nés 40 ans plus tôt, ainsi que les décors minutieux, de la ville typique du Nouveau Mexique jusqu'au bayou perdu au fin fond du Texas, en passant par divers églises, bordels, prisons ou autres asiles de fous, tous à la mode de 1934.
Carnivàle est une expérience grandiose pour qui y accroche, même si certaines scène sont particulièrement sordides ou effrayantes (l'image de Dora Mae à travers une fenêtre de Babylon, c'est un coup à faire des cauchemars). La fin est un peu trop rapide et nous suggère une suite qui n'arrivera jamais, mais s'achève pourtant sur une note de symbolisme. J'adore le symbolisme.