Le Rakugo ou la vie
7.9
Le Rakugo ou la vie

Anime (mangas) TBS (2016)

J'ai pas su noter autrement... c'est grave ?

Je crois que je me souviendrai longtemps du jour où j'ai atterri, par hasard, sur la page de cette série, au gré de mes pérégrinations dans la jungle de l'animation nippone. J'observe la moyenne globale. Elle pique ma curiosité. Puis je lis le résumé... Et je m'interroge, perplexe... Je regarde à nouveau la moyenne globale, puis je relis le résumé (véridique). "Comprends pas, ça a l'air d'un ennui abyssal..." me dis-je, incrédule.

Qu'il est bon parfois de se tromper...

Vous l'aurez compris, Le Rakugo ou la Vie fut une surprise de taille, et je dois bien avouer que ces japonais ne cesseront jamais de m'étonner : créer une histoire riche, captivante et originale autour de l'art de raconter une histoire (le rakugo), représente à mon avis un sacré défis à relever, et j'étais à des années-lumière de m'imaginer que cela était possible. J'allais, sans le savoir, être emporté par une alchimie indescriptible du premier au dernier épisode. Mais à bien y réfléchir, le scénario qui nous est proposé ici est finalement simple dans son ensemble, à l'instar des autres "slice of life" d'ailleurs... Une simplicité certes bienvenue et toute relative, mais une simplicité quand même. D'où vient alors ma fascination ?

Toute la force de cette série réside en réalité dans un travail extrêmement abouti des personnages, et surtout des deux protagonistes Kikuhiko et Hatsutarou. Deux caractères bien distincts, bien trempés, qui s'aiment l'un l'autre autant qu'ils se détestent, deux manières bien différentes d'apprendre, de pratiquer, de concevoir et de vivre leur art, et finalement deux façons d'appréhender la vie, une vie qui leur réserve parfois d'étranges similitudes avec les pièces qu'ils choisissent de jouer sur scène. On s'attache à eux, et l'on se prend parfois nous aussi à les aimer ou à les détester, selon leurs paroles ou leurs actes. C'est autour de cet antagonisme que le récit va se construire progressivement et prendre énormément d'ampleur et d'influence, à diverses époques et sur plusieurs générations. Techniquement, c'est une claque, de la façon de révéler les émotions sur les visages jusqu'au doublage. J'avais parfois l'impression que ces personnages... pardon... que ces "personnes" allaient sortir de mon écran pour se matérialiser dans la pièce, et le doublage, justement, est bien ce qui a failli me faire tomber de ma chaise ! On atteint ici un sommet de talent et de maîtrise théâtrale, principalement dans les scènes de rakugo durant lesquelles le seiyuu (acteur de doublage au japon) double non seulement son personnage, mais aussi et logiquement ceux joués par celui-ci devant son public. Dans mon souvenir, il me semble même qu'une scène pousse encore plus loin cette ramification, l'un des personnages interprétés par Hatsutarou jouant lui-même la comédie !

Ces scènes de rakugo ont beau être fréquentes et d'une longueur plus qu'osée, elles ne suscitent pourtant jamais l'ennui. Cette prouesse découle non seulement de la qualité du travail décrit précédemment, mais aussi de la pertinence et du dynamisme du montage, avec des plans astucieusement choisis qui se succèdent tout en cohérence et en fluidité. Le contexte sonore, et notamment les réactions du public, habilement maîtrisées, ajoute encore au soucis de crédibilité et d'authenticité de l'évènement. On assiste réellement à du rakugo, et c'est un vrai plaisir !

La bande originale, quant à elle, est une pure merveille, et oscille régulièrement entre classique et jazz, ambiances parfaitement bienvenues. Quant aux openings et endings, ils sont juste improbables, et nous offrent, à l'image des épisodes, un exotisme des plus gracieux.

Je ne saurais trop vous encourager à vous lancer dans cette série, qui constitue à mes yeux une perle rare et discrète. Avec Le Rakugo ou la Vie, les japonais nous montrent une fois de plus qu'ils sont bien les maîtres dans l'art de l'animation et de tout ce qui peut graviter autour, un art avec lequel ils sont décidément capables de tout raconter.

AlekD
10

Créée

le 29 juil. 2022

Critique lue 1.1K fois

5 j'aime

4 commentaires

AlekD

Écrit par

Critique lue 1.1K fois

5
4

D'autres avis sur Le Rakugo ou la vie

Le Rakugo ou la vie
JulesTrevissac
9

Aussi bien qu'Haikyu... Dans un autre genre.

Shouwa Genroku Rakugo Shinjuu c'est assez simple. C'est d'abord une sorte de triangle amoureux qui se passe dans les années 40 et qui est encadrée par une histoire se déroulant une vingtaine d'année...

le 2 avr. 2016

8 j'aime

1

Le Rakugo ou la vie
Jesustice
9

L'art de la parole nippone

Celui de conter une histoire, dans le respect des traditions, dans un Japon du milieu du XXe siècle alors que la radio commence à s'affirmer dans le pays et menace cet art ancestral. Pour faire...

le 5 oct. 2021

6 j'aime

3

Le Rakugo ou la vie
AlekD
10

J'ai pas su noter autrement... c'est grave ?

Je crois que je me souviendrai longtemps du jour où j'ai atterri, par hasard, sur la page de cette série, au gré de mes pérégrinations dans la jungle de l'animation nippone. J'observe la moyenne...

le 29 juil. 2022

5 j'aime

4

Du même critique

Vinland Saga
AlekD
9

La vengeance est un plat qui se mange TRES froid...

Vinland Saga, c'est avant tout une histoire classique qui répond à l'un des archétypes scénaristiques les plus efficaces qui soient : un personnage qui subit ce que la vie peut réserver de plus cruel...

le 30 juil. 2022

8 j'aime

4

La Ménagerie de papier
AlekD
10

Ken Liu, tu m'as eu !

Comment as-tu pu me tirer les larmes ? moi qui n'avais jamais pleuré sur un seul livre ! Il est vrai que ce bon vieux docteur Asimov avait bien failli me faire craquer avec "L'Homme Bicentenaire",...

le 29 juil. 2022

7 j'aime

L'Attrape-Cœurs
AlekD
9

"Si un coeur attrape un coeur qui vient à travers les seigles..."

Voilà une phrase dont je me souviendrai longtemps... Une phrase qui résume à elle seule le rôle joué par ce livre vis à vis de son lecteur. Une phrase qui justifie à elle seule la lecture de ses 240...

le 24 oct. 2022

6 j'aime

3