Disons-le d'entrée, cette série est intéressante dans le sens où elle nous fait découvrir un milieu inconnu et fermé : l’opéra. C’est une série de qualité qui devrait par ailleurs facilement s’exporter dans le sillage de "Emilie in Paris".
Le récit est centré sur deux personnages :
- Zoé une danseuse étoile de 35 ans qui revient de blessure et veut retrouver son lustre d’antan tandis que Sébastien le nouveau directeur de la danse veut qu’elle se retire.
- Flora, une jeune danseuse noire qui intègre le prestigieux opéra.
Et là, c’est la catastrophe ! Je n’ai rien à dire sur la comédienne Suzy Bemba qui joue parfaitement bien. Mais nous avons droit à un empilement de poncifs.
À son arrivée à l’opéra, Flora est déjà soumise à un contrôle pointilleux de la part du vigile. Puis, on la prend pour une femme de ménage… Était-on obligé d’aller aussi loin dans la caricature ?
On la voit, prendre le métro, rejoindre la cité, répéter consciencieusement dans sa chambre ou esquisser des pas de danse sur un parking.
Lors de sa première répétition, elle se fait rabrouer par le prof. Mais comme elle est noire, on suggère de façon "subtile" qu’elle est victime de la fameuse "oppression blanche", chère à Rokhaya Diallo !
Pendant une pause entre deux répétitions, bonjour Cosette ! Autour d’elle, les autre danseurs sont assis en petits groupes, entre blancs. Et elle, la seule danseuse noire, et bien elle est seule…
Fatalement, on voit la gentille, courageuse et bosseuse Flora se confronter aux autres danseurs.
On aura droit à l’interpellation d’un garçon qui lui dit ; "Tu sais que tu es noire ?", parce que son rêve est de jouer le rôle d’un personnage fantomatique.
On nous présente les jeunes danseurs blancs comme des individus ambitieux, racistes et brutaux. Pourtant, la question de l’interprétation d’un rôle par une personne de couleur mérite d’être posée.
Imagine-t-on qu’un acteur noir interprète un viking ou qu’un acteur blanc interprète un guerrier zoulou. Techniquement, il n’y a pas de problème. Mais un film, c’est aussi de l’image.
Il me semble qu’on peut poser la question sans qu’on soit perçu comme un héritier du Klu-Klux-Klan.
Alors que la série semblait viser juste en nous dévoilant la vie d’un opéra, je m’étonne de la lourdeur dans le traitement du personnage de Flora.
Pourquoi en avoir fait une jeune fille vivant dans une cité et pas plutôt une jeune femme issue de la classe moyenne ?
Poser la question, c’est y répondre. On a voulu surfer sur la vague Black Lives Matter (ou Adama Traoré, c’est selon).
Entre nous, il ne doit pas y avoir beaucoup de danseurs (qu’ils soient noirs ou blancs) qui aient vécu dans une cité…
De plus, si on l’avait située dans un milieu noire aisée, ç’aurait été une image plus valorisante pour la communauté noire que la sempiternelle représentation des afro-descendants à la TV.
J'aurais préféré qu'on nous propose une jeune danseuse noire provenant d'un milieu social favorisé, avec l'arrogance et la suffisance qui sied à ce milieu.
Les producteurs ont choisi. Ils ont préféré la jeune noire, victime et parfaite. Car Flora n'a pas de défaut, une vraie figure christique. Et en plus, c'est une femme de gauche ! On la voit un moment debout sur une table, haranguer les autres danseurs. Pendant ce temps, quasiment tous les personnages blancs sont détestables, arrogants, méprisants ou futiles.
Une scène est emblématique : Flora se prépare à entrer sur scène comme remplaçante mais on lui préfère une danseuse blanche. Ce n'est pas dit mais tout est suggéré.
Flatter le wokisme, est de toute évidence devenu aujourd'hui la règle.
Je n'ose imaginer ce que cette série raconterait si elle avait été produite par Netflix : une jeune danseuse noire et lesbienne, rejetée par ses parents homophobes, dont le meilleur ami est un gay extraverti, mais qui finira par renouer avec ses parents en leur présentant sa copine, une musulmane pakistanaise...
Je serai injuste si je n'évoquais pas le directeur de la danse Sébastien Cheneau (interprété par Raphaël Personnaz). Il est, me semble-t-il, le personnage le moins caricatural. Il parvient à afficher une certaine morgue mais avec sobriété. Il est confronté au quotidien d'une entreprise aussi singulière qu'un opéra. Parce qu'une série doit de nos jours être inclusive, il est gay et couche avec le conseiller culturel. C'aurait été plus audacieux de montrer qu'il a une relation avec l'un des élèves...
Dans la série "J'enchaine les clichés comme on enfile les perles", on a droit à la jeune danseuse blanche, issue d'un milieu bourgeois et poussée à la danse par son père rongé par l'ambition, froid et insensible. C'est peut-être une réalité mais on aurait aimé plus de subtilité.
En parallèle, Flora est encouragée par une mère prévenante et aimante.
Que cherche-t-on à nous montrer sinon qu'une famille blanche est par nature toxique ?
Et puis arrive le moment "Adama Traoré" de la série, à savoir un contrôle policier au pied de la cité où Flora s'entraine. Un contrôle au faciès, cela va sans dire.
On nous glisse ici un message subliminal à défaut d'être subtil : la police est raciste.
Ma critique est longue parce que les clichés à la mode woke m’ont fait bondir.
Je mets une note de 7 car la série reste plaisante et nous propose un univers que peu de gens connaissent. J'avoue aussi que la série ne peut pas être réduite au focus que j’ai fait même si celui-ci est agaçant et peut vous sortir de la série. J'ai apprécié le traitement social de l'Opéra, à travers la procédure de licenciement de Zoé qui plombe l'ambiance et détériore les rapports humains, à travers les problèmes d'organisation qui se présentent,...
La saison 1 s'achève sur plusieurs ouvertures.
Mais que pourrait-il bien arriver dans une hypothétique saison 2 ?
- une danseuse handicapée pour être plus inclusif ?
- un danseur transgenre ?
- une danseuse musulmane qui veut garder son voile pendant les représentations et veut conjuguer sa religion avec sa passion ?
Je mets une pièce sur la danseuse musulmane parce que ça n'a pas été abordé dans la saison 1 et aussi parce qu'après le procès de Charlie Hebdo et du 13 novembre, on veut nous envoyer un grand message humaniste et une leçon de vie façon France Inter.