Difficile de structurer mes pensées contradictoires au sujet de cette incroyable saga, fort inégale autant que très marquante. Pour ma part, comme je regarde assez peu de science-fiction, "Lost" restera par conséquent une œuvre inoubliable dans mon esprit, en dépit de son incapacité à s'achever dignement.
Le show imaginé par Damon Lindelhof s'étale sur 6 saisons hétérogènes, en sachant que les scénaristes s'étaient engagés à ne pas dépasser ce seuil, à juste titre.
Malgré cette certitude, qui a permis à "Lost" de ne pas multiplier les saisons de trop (les 2 dernières restant néanmoins les plus faibles), on regrettera une certaine dilution de l'intrigue dans de trop nombreux épisodes et de trop nombreux personnages.
Cela dit, c'est toujours difficile de reprocher cet aspect-là à une série télévisée, dont la nature même est de faire durer son audience lorsque celle-ci est large.
Après une excellente saison inaugurale en mode "Survivor", des rescapés d'un accident d'avion devant se débrouiller sur une île déserte, on assista à des saisons 2 et 3 de plus en plus axées sur le fantastique, l'île diffusant ses mystères au fur et à mesure.
A partir de la saison 4, alors que des réponses commencent à être apportées (en suscitant de nouveaux questionnements), les invraisemblances et les incohérences se multiplient pour un esprit un minimum rationnel.
Je comprends alors qu'il faut faire son deuil de la cohérence pour se laisser porter par les flashbacks, flashforwards et autres réalités alternatives…
"Lost" connaît hélas une dynamique régressive à mesure que les saisons se succèdent (et qu'on s'éloigne de la mythologie initiale, laquelle ne connaîtra jamais d'explications satisfaisantes), sans pour autant que le plaisir ne disparaisse complètement bien sûr.
On se sera suffisamment attaché aux personnages les plus charismatiques (Sawyer, Benjamin Linus, John Locke...) et on aura tant adhéré à cet univers d'aventures et de science-fiction, souligné par une musique dissonante parfois bien flippante, que l'on aura continué à suivre fébrilement cette série pas comme les autres, pardonnant aux scénaristes leurs ratages de plus en plus fréquents.
Au final, plus encore que les invraisemblances et autres facilités scénaristiques, je regrette surtout l'aspect mainstream de "Lost" : diffusée sur ABC, la série conserve un ton sage en toutes circonstances, refusant de basculer dans l'horreur ou dans l'érotisme, alors que le contexte s'y prêtait si bien.
Imaginez un instant un ton sexy à la "Game of Thrones", où la pulpeuse Kate se baignerait nue au milieu de la jungle, avant d'être rejointe par Sawyer pour un face-à-face animal...
Non, ici les héros sont en situation d'abstinence sexuelle chronique, mais tout le monde sait se tenir, messieurs dames, on n'est pas chez les sauvages... Ben si, justement!
Plus sérieusement, je garderais globalement un bon souvenir de "Lost", une série unique en son genre, apparue au cours de l'âge d'or télévisuel, dont la mythologie complexe n'a pas fini de passionner les fans les plus irréductibles.