Millennium, diffusée en 1996 sur FOX, c’est un peu comme si X-Files décidait de se faire une petite crise existentielle et plongeait dans les ténèbres les plus opaques de l’âme humaine. L’histoire suit Frank Black, un ex-agent du FBI capable de littéralement entrer dans l’esprit des pires criminels. Sa particularité ? Une capacité à voir le monde avec un réalisme glaçant, presque prémonitoire. Pour tout dire, Frank n’a rien de l’optimiste : pour lui, l’apocalypse n’est pas une théorie, c’est une certitude, et il est bien décidé à la contrer… ou à l’affronter, on n’est jamais tout à fait sûr.
Frank est un héros aussi captivant que déprimant, un homme de peu de mots avec une intensité qui ferait pâlir un moine shaolin. Avec son imperméable beige et son regard perçant, il n’a pas besoin de phrases longues pour nous convaincre que le mal est omniprésent, il le voit partout. Son don de "profiling" semble parfois être plus une malédiction qu’une aide. Ce n’est pas exactement la fête à la bonne humeur, mais pour les amateurs de drame psychologique, Frank est l’anti-héros parfait, un type qui inspire autant de respect que de frissons.
À travers ses enquêtes, Frank est épaulé (ou perturbé) par le mystérieux Groupe Millennium, une organisation secrète dont la spécialité est de tourner en rond autour des concepts de fin du monde et de conspiration apocalyptique. Le groupe oscille entre sagesse mystique et obsession du complot, donnant souvent l’impression qu’il y a autant de mystère dans leurs réunions que dans les crimes qu’ils investiguent. À chaque enquête, Frank doit démêler les crimes eux-mêmes de ce que le groupe voit comme des signes de l’Apocalypse, ce qui rend ses investigations aussi labyrinthiques que paranoïaques. On ne sait jamais vraiment s’ils sont là pour aider Frank ou pour le perdre un peu plus dans son esprit tourmenté.
L’ambiance de Millennium est noire, très noire. Les décors sont aussi lugubres que les crimes : forêts brumeuses, ruelles sombres, et sous-sols mal éclairés deviennent le terrain de jeu des pires psychoses. Chaque épisode semble enveloppé d’une épaisse couche de gris et de mystère, comme si même la lumière du jour hésitait à se montrer. Les meurtres, souvent brutaux et dérangeants, sont filmés avec un réalisme troublant. La série ne cherche pas le grand spectacle, elle mise sur une atmosphère oppressante où l’horreur est suggérée plus que montrée, ce qui rend les épisodes encore plus dérangeants. Ici, les monstres ne sont pas surnaturels, ils sont humains, et c’est bien là le problème.
Visuellement, Millennium est aussi stylisée qu’une descente aux enfers : tout est fait pour nous plonger dans l’angoisse, avec une palette de couleurs ternes, des cadrages serrés, et une bande-son inquiétante. Les choix esthétiques renforcent l’idée que l’apocalypse n’est pas un événement spectaculaire, mais un effritement lent et insidieux de la normalité. La série parvient à nous faire ressentir l’angoisse qui ronge Frank sans jamais céder aux excès visuels, misant sur un réalisme quasi documentaire qui rend l’horreur encore plus palpable. Ce n’est pas une série pour se détendre, c’est une plongée dans un monde où chaque porte peut cacher une nouvelle forme de mal.
Cependant, cette noirceur peut aussi être épuisante. La série a tendance à répéter son schéma : un crime abominable, une enquête qui mène Frank dans les recoins sombres de l’esprit humain, une petite dose de mystère ésotérique. Et à force de voir l’Apocalypse derrière chaque crime, le spectateur peut se sentir un peu assommé par cette ambiance pesante. Millennium n’est clairement pas là pour vous remonter le moral. C’est une expérience intense, et pour certains, la dose de drame surnaturel et de noirceur humaine pourrait devenir un peu lourde.
En conclusion, Millennium est une série captivante, aussi sombre qu’intrigante, qui nous entraîne dans une vision angoissante du monde où chaque crime semble être le présage d’une fin inéluctable. Frank Black est un héros tourmenté comme on en voit peu, et ses enquêtes nous confrontent à une brutalité sans artifice, tout en distillant une dose de mystère apocalyptique qui rend le tout fascinant. Pour les amateurs de thrillers psychologiques, c’est un véritable festin de noirceur. Pour ceux qui préfèrent une touche d’optimisme… disons que Millennium pourrait les convaincre que la fin du monde est peut-être plus proche qu’ils ne l’imaginent.