(Saison 1 et 2)
L'univers de la série Américaine est capable du pire comme du meilleur. Depuis désormais une poignée d'épisodes, Mr. Robot présente tous les atouts pour devenir l'une des séries la plus audacieuse et la plus réussie de ces dernières années.
A l'image, le récit est servi par une ambiance assez pesante. Des cadrages excentrés, des plans fixes larges et des lumières discrètes donnant une ambiance assez glauque aux épisodes. Le choix du casting est impressionnant, on découvrira les possibilité des acteurs dans le temps, mais à l'heure de la critique, je ne vois aucune fausse note.
On peut dire que dans l'ensemble, la réalisation n'est pas vraiment originale, mais reste d'une qualité sobre bienvenue, avec un format 50 minutes appréciable. Chaque semaine on à le temps de se replonger dans le récit, ce qui est bien plus efficace finalement qu'une série découpée en 30 ou 45 minutes, avec un montage aux cuts frénétiques.
Mais le sel de Mr. Robot, au delà de ces qualités intrinsèques, c'est son discours.
On retrouve les ingrédients antisystème d'un Fight Club, ainsi que la schyzophrènie du personnage principal. Seulement, là où Mr. Robot se démarque, c'est dans son détachement. Autant le personnage d'Eliot est dans la détresse la plus totale, autant l'on a pas un seul instant l'impression qu'il sombre uniquement dans la folie.
Car pour revenir à la comparaison avec Fight Club, la révolution lancée par le protagoniste se fait totalement à son insu, et il prends conscience sur le tard de sa personnalité multiple... son alter-égo prenant finalement totalement possession de ses moyens.
Eliot/Mr.Robot à un trouble de la personnalité semblable, mais à la grande différence que la folie d'Eliot est consciente presque depuis le départ ! Ce qui donne bien plus de spectacle, de rebondissements et de sensibilité à la série. Eliot n'aura de cesse de trouver un moyen de regagner le contrôle, d'où son mal-être permanent, cet état d'apesanteur dans lequel il est plongé, ainsi que le spectateur.
Il est évident que le jeu de Rami Malek est pour beaucoup dans le succès de la série. Mais il faut également observer la manière dont le décor est planté. C'est une vision théorique du complot moderne et dangereusement probable que nous raconte Mr. Robot. Car au-delà de l'intrigue basée sur Eliot, un des sujets forts du récit veut nous montrer les ramifications d'un système tout puissant, profondément ancré dans notre quotidien.
On pourrait d'ailleurs tenter un parallèle entre la maladie mentale d'Eliot, et notre état face à la réalité de ces puissances de l'ombre : ne sommes nous pas tous conscients d'être sous l'emprise de manipulations incessantes ? D'autant d'ailleurs seront à même de vouloir déboulonner le système, tandis que d'autres se laisseront bercer dans l'insouciance et l'oubli.
Mr. Robot nous ressemble, nous met face au malaise de notre génération : notre ambivalence permanente face à la domination de nos esprits par les marchés, notre choix de subir ou de se révolter. La série offre (pour le moment du moins) un formidable terrain de jeu de réflexions personnelles au spectateur sur la place qu'il occupe dans le système.
Finalement qui voulez-vous être : Eliot, ou Mr. Robot ?
La suite vous aidera sans doute à le découvrir...