Si vous avez lu "Une vie" de Guy de Maupassant il vous semblera qu'il s'en est disséminé des petits morceaux, ça et là, dans cette mini série réalisée pour HBO. Superbement mis en image par Lisa Cholodenko, on pourra apprécier le soin apporté aux décors, aux costumes et à la lumière. Le rythme ajusté et le montage soigné font de ce film (pourtant inégal sur ses 2 derniers épisodes) un petit bijou plastique.
Côté contenu, on accompagnera Olive (superbement interprétée par Frances McDormand), femme à la rudesse assumée, dont la vie a la saveur d’un long après midi dominical. Olive est enseignante, épouse et mère. Lapidaire, abrupte et épineuse, elle se dresse contre le monde tel un bloc de granit. Sa vie entière transpire la lassitude et l’ennui d’un éternel dimanche crépusculaire.
A voir ce personnage et son entourage qu’elle domine en esclave acariâtre, on ne peut s’empêcher de la détester comme on se déteste parfois soi-même quand on est lâche ou qu’on procrastine. Vous voulez savoir comment passer à côté de votre existence ? Comment vous rendre prisonnier de vos propres servitudes ? Comment faire pour vivre sans vivre ? Olive Kitteridge a les réponses à ces questions.
Il faut, comme elle, être la digne gardienne des peurs, des colères, des frigidités, des principes et des traditions qui vous ont été légués. Car vous aurez une mission (si vous l'acceptez) : les léguer à votre tour à ceux qui s’approchent de vous. Voilà la seule forme d'amour qu'Olive sache exprimer. Car ainsi, elle pourra laisser le monde exactement dans « l’état dans lequel elle l’a trouvé en arrivant».
Olive préfère la colère à : l’amour contrarié arrivé sur le tard pour un collègue de travail, la tendresse maternelle pour son enfant qu’elle n’a pas pris le temps de regarder grandir, son mari choisi par défaut qu’elle finit par confondre avec un meuble…
Il lui aura fallu 4 épisodes d’une durée de 4 heures au total (soit presque sa vie entière) pour faire ce constat tout simple « la vie ça devient vraiment la vie quand on arrête de la prendre trop au sérieux ! ». On a envie de lui dire « Tout ça pour ça !? »
Mais bon on lui pardonne, Olive alors veuve et sexagénaire, attend d’être sur un lit avec Bill Murray pour se rendre compte qu’on ne peut pas vivre sans exister. Après avoir fait le constat de ses manquements (avec son fils, son mari, etc) et de ses échecs, elle finira par admettre (baissant enfin les armes) : « Ce monde ne cesse pas de m’étonner. J’ai pas envie de le quitter tout de suite.»
Voilà une série qui n’est pas forcément indispensable (sinon pour ses 2 interprètes principaux et sa réalisation). C’est exactement pour cette raison que vous pourriez apprécier ce voyage au coeur du noyau de cette Olive. Pour peut-être ne pas en devenir une… ou presque !