En voilà une série TV vraiment originale ! Pas évident, à l'ère où le marché se partage entre une production à la chaîne estampillée Amazon ou Netflix et des redifs gavantes sur la TNT. En la matière, Canal+ ne perd pas la main, surtout pour ce qui est de la création française exigeante (Engrenages, Baron Noir, Le Bureau des Légendes, et j'en passe). Dans ce paysage loin d'être sinistré, OVNI(s) débarque avec fraîcheur en ce début d'année 2021 marqué (faut-il le rappeler) par une crise sanitaire persistante, qui pénalise sévèrement le monde culturel dans son ensemble, et nous avec. Rien que pour ça, merci !
Ce qui fait la singularité de cette série, ce n'est pas tellement le thème principal (la science-fiction regorge d'oeuvres écrites ou imagées qui ont satisfait, avec beaucoup plus d'ampleur, notre curiosité extraterrestre) mais plutôt l'angle choisi pour causer des petits hommes verts. Un angle à la fois poétique et humoristique, quelque part entre Rencontre du troisième type et la Soupe aux choux, voire entre E.T. ("Téléphone maison") et les babas cool. Sans cesse, on oscille entre un cadre sérieux (le CNES, le Ge(i)pan, l'Agence spatiale européenne) et un récit totalement délirant. Pas étonnant, après, de se retrouver au fin fond du Larzac shooté au LSD, n'est-ce pas Monsieur Mathure ?
Dès le départ, il est fortement conseillé d'accepter ce ton savamment décalé pour apprécier la réalisation d'Antony Cordier. En douze épisodes assez courts (une petite demi-heure chacun), ce dernier parvient à nous emmener loin dans son trip, le temps d'un voyage fort sympathique à la fin des années 1970. Le travail formel (photographie et musique vintage) contribue à nous plonger dans une ambiance légère et agréable, faite d'insouciance et d'espoir qui semble, à bien des égards, révolue. Je ne sais pas pour les générations précédentes, mais moi (bien que né en 1983) j'ai ressenti une certaine nostalgie là-dedans...
Ce qui m'a rendu cette aventure encore plus sympathique, c'est le casting (lui-même servi par de savoureux dialogues), excellent de A à Z. Melvil Poupaud est parfait en ingénieur lunaire et pince-sans-rire, tout comme ses deux padawans chasseurs d'aliens (Quentin Dolmaire et Daphné Patakia), avec une mention spéciale à Michel Vuillermoz de la Comédie-Française (ne jamais oublier la particule), qui régale comme souvent dans un rôle d'espion romantique taillé à sa démesure. Bref, de la belle ouvrage, mesdames et messieurs. Ou plutôt, du divertissement hautement qualitatif, comme on dirait à notre époque. Quant à E.T., ça fait belle lurette qu'il a pianoté sur son téléphone à cadran pour rentrer à la maison...