J'ai eu peur, très peur. Malgré le talent indéniable de Benedict Cumberbatch, l'exubérance de son personnage, Patrick Melrose, véritable déchet aristocrate anglais circulant au radar sous l'effet quasi-ininterrompu de drogues et d'alcools dans les rues de New York, ne laissait présager rien de bon. Il y a quelque chose de très poussif dans ce premier épisode qui en devient presque agaçant de facilité tant le rendu de cette addiction destructrice sonne comme du déjà vu. Qui plus est, notre bonhomme est riche. Quels pourraient-donc être ces vrais problèmes qui l'amènent ainsi à se détruire à petit feu ?
J'avoue avoir eu du mal en premier lieu à croire en ce qui allait finalement être une série bien plus fine qu'espéré.
Si tout démarre avec la perte de son père, il faudra finalement attendre la fin de ce premier épisode pour réellement saisir l'état d'esprit dans lequel se trouve notre héroïnomane et comprendre les démons qui l'habitent et qu'il tente de faire taire par tous les moyens.
A partir de là, de flashbacks en flashforwards, la série nous amène sur plus de 4 décennies, des racines du mal jusqu'à leurs répercussions et explore avec finesse les dysfonctionnements d'une famille émotionnellement démantelées par les actes odieux d'un père cruel, principalement envers son fils.
Benedict Cumberbatch excelle au-travers d'une large palette d'émotions, de la rage à une tristesse pudique, de l'amour à l'écœurement et, Hugo Weaving et Jennifer Jason Leigh ne sont pas en reste dans leur rôle, l'un en pervers narcissique donnant la nausée et l'autre qui semble glisser sur tout ça avec un déni glaçant. Derrière ces trois figures majeures, l'ensemble du microcosme gravitant autour de Patrick au fur et à mesure des années apporte à la fois charme, humour et espoir d'un futur plus brillant. La série oscille perpétuellement entre le "poison générationnel" qu'il faut drainer, les chaînes d'un passé destructeur dont il faut se défaire et les schémas que l'on ne veut pas reproduire pour couper court à la transmission de ce qui nous plombe.
Avec un sujet poignant et dur, cette adaptation des romans semi-autobiographiques de Edward St Aubyn réussit à nous émouvoir et à nous attendrir autant qu'elle nous écœure. Elle décrit en filigrane et avec pudeur, à travers le portrait de cet homme brisé, les traumatismes intergénérationnels et les ravages de la parentalité toxique. Une mini-série finalement juste et réussie portée par de superbes acteurs.