Ranpo Kitan: Game of Laplace
5.5
Ranpo Kitan: Game of Laplace

Anime (mangas) Fuji TV (2015)

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All that we see or seem is but a dream within a dream.

Parlons un peu de femmes-chaises voulez-vous ?


Parmi les très nombreux concurrents qui essayent de se faire une place dans le monde de l'animation on ne peut pas dire que le studio Lerche fasse partie des plus à plaindre. Créé en 2011 il se fait plutôt discret sur ses débuts mais en 2012 on le charge de l'adaptation d'un petit jeu peu connue : Persona 4. Cette dernière en plus d'un bon succès commercial leur offre une visibilité certaine annonçant un avenir plein d'espoir pour le studio. Accélérons ici le cours du temps pour passer rapidement sur l'adaptation d'un des shonen les plus prisés du moment j'ai nommé Assassination Classroom ainsi que celle d'un jeu fort apprécié au Japon : Danganronpa.


D'année en année Lerche fait son nid mais une question subsiste : y-as-t-il des créatifs dans ce studio ? Après tout la question n'est que légitime. Les animes ayant permis leur ascension sont à bien des égards des œuvres encourageant assez peu la créativité. Les spectateurs ayant une idée bien précise de l'anime qu'ils vont visionner. Nous voici aujourd’hui en 2015 et la réponse à cette question vient d'être trouvé, elle se trouve parmi les animes sortis cet été.


Ranpo Kitan: Game of Laplace donc, anime créé pour les 50 ans du décès de l'auteur japonais Ranpo Edogawa dont certains décrivent le style comme un mélange de Edgar Allan Poe et de Conan Doyle. Dommage Lerche vous êtes passé à ça (je fais le signe "petit" avec mes doigt un peu d'imagination) de créer une oeuvre originale.


On va commencer par ce qui (me) fâche : le visuel.


Objectivement parlant l'anime n'a pas vraiment à rougir il n'est ni sublime ni immonde mon problème vient du chara-design que je trouve d'une fadeur à toute épreuve je serais bien tenté de l'appeler le chara-design passe partout mais certain anime des années 90 auraient tôt fait de me faire mentir. Et si Gakkou Gurashi n'était pas sortie en parallèle j'aurais fini par pensé que Morita Kazuaki (Danganronpa, Assassination Classroom, Persona 4...) était le seul chara-designer du studio ce qui n'aurait pas plu à mon médecin généraliste.


Fortement liés au problème cité les personnages ne partaient pas gagnant et pourtant ils s'en tirent fort bien.


Après avoir suivi Akechi durant ces 11 épisodes je dois bien admettre qu'il a un certain charisme avec son air taciturne et son café à la main reste à savoir lequel des deux améliore le charisme de l'autre. Plus sérieusement la plupart des grands détectives de fiction sont souvent dépeints comme des victimes de leurs propres génies qui les claquemure dans un univers impossible d'accès au "simple mortel" ce qui explique en partie leur conduite très déconnectée du monde (coucou Sherlock).


Mais j'ai été agréablement surpris de voir ici un détective bien ancré dans la réalité qui ne se donne pas de grand air supérieur et dont chaque parole ne suinte pas la condescendance. Il est rationnelle, concis et son côté un peu misanthrope n'est là que pour mieux appuyer l'humanité profonde qui se cache sous son teint blafard. Bref un gars à qui j'offrirais bien un café.


Bon j'ai pondu un petit pavé sur Akechi alors on cause vite de Kobayashi et on change de topic :


Kobayashi comment parler de toi mon grand/ma grande ? Ce personnage est un mystère à lui tout seul aussi bien d'un point de vue sexuel que psychologique. Je pense que Kobayashi incarne enfaîte ici quelque chose d'assez simple, quelque chose qui a quitté ce monde : La curiosité.


C'est ce sentiment qui le fait regarder les meurtres les plus atroces avec un grand sourire de satisfaction, tout heureux d'avoir découvert quelque chose de nouveau dans un système aux normes trop oppressantes pour son esprit si imaginatif.


C'est d'ailleurs le thème centrale de ce Ranpo Kitan: Game of Laplace.


La justice en prenant certes pour son grade mais n'étant en fait qu'un tremplin vers une évolution plus large de la critique sociétale : http://i.imgur.com/60n6dvM.png.


Bon au début je vous ai promis de la créativité dans la réalisation alors nous y voila enfin.


Toutes les trouvailles visuelles à ce niveau la se trouvent dans la manière qu'a l'anime de jouer avec la réalité. La plus évidente d'entre toutes est bien évidemment la mise en scène théâtrale. Que ce soit l’éclairage, l'atmosphère figée dans le temps, le symbolisme du papillon ou les 3 minutes choquante tout est fait pour que l'on ne sache plus vraiment sur quel pied danser. Rajoutez à cela des personnages loufoques comme le Shadow-man en omettant volontairement d'expliquer comment fonctionne leur capacité et vous fabriquez un monde dans le monde avec ses propres règles et conséquences.


La séparation entre ces deux univers et d'ailleurs très nette marqué par l'absence d'apparence humaine chez les citoyens n'interagissant pas avec les protagonistes. Cela évoluera au fur et à mesure que l'on se rapprochera de la fin, du changement désiré par


Namikoshi


moment ou les silhouettes sans expressions apparaîtront clairement comme si le port du masque leur avait enfin donné une identité, une voix pour être entendue. Quant à celle ne participant pas activement au conflit elles seront montrées sous forme de pantin dont le visuel est assez explicite.


Pour finir on constate d'ailleurs


qu'après le suicide de Namikoshi


beaucoup moins de personnes sont représentées de façon stylisé même si certaines subsistent parmi d'autres à l'apparence humaine comme si les deux réalités qu'on nous a présentées n'en formait à présent plus qu'une.


Le dernier point fort que je citerais ici et qui vient sublimer tous les éléments précédents c'est bien évidemment l'ost que je ne pouvais faire passer à la trappe tant elle est réussie. Des thèmes d'enquêtes aux thèmes contemplatifs elle accompagne à merveille cette pièce de théâtre d'un autre monde. La chanson Last Days étant d'ailleurs vraiment magnifique et emplie d'une mélancolie surnaturelle portant comme un espoir, une envie de recommencement, de remise à zéro pour la société, pour le monde. Le seul reproche que je ferais à cette ost est qu'elle ne sort que le 25 novembre ce qui va être pour moi une attente interminable.


Oui, la fin... La fin de Ranpo Kitan: Game of Laplace est particulièrement intéressante mais plus qu'une analyse sociale ou psychologique de la société elle met le doigt avec ses visuels symboliques sur quelque chose de très intéressant. Ces étranges moments ou parfois la fiction et la réalité se mélange pour ne former qu'un seul et même univers au code redéfini. Vous voyez où je veux en venir n'est-ce pas ?


Tout cela serait donc une habile mise en abyme qui nous placerait dans cet état de flottement où tout reste à décider ce moment où des gens nourris au récit de Ranpo Edogawa se vêtiraient du masque de Vingt-Visages et sortiraient de chez eux crachant leur colère sur un monde qu'ils ne reconnaissent plus comme le leur.


J'en vois parmi vous qui ont lu ces dernières lignes avec le visage de quelqu’un qui vient de découvrir le testament d'un vieil anarchiste diabétique fan de littérature japonaise mais ce sont des événements comme l'affaire glico-morinaga qui me font penser que ce monde, tout formaté qu'il est, peut encore voir naître la folie et sa ça fait partie des choses qui me feront toujours sourire.


EDITO : J'ai relu ma critique plusieurs mois après sa publication et je tenais à préciser, juste au cas où, que malgré le caractère prophétique/grandiloquent de ma conclusion je ne suis pas entrain de faire un quelconque appel à la révolution ou je ne sais quelle autre connerie. Je m'amuse simplement d'un phénomène de société voila tout.


Autre chose je n'en ai pas fait mention à l'époque mais la fameuse "trahison" de la réalité dont je parle plus haut se voit également très bien avec le personnage de Minami qui semble être dans un premier temps totalement irréel et qui n’apparaît qu'au spectateur dans un but uniquement comique ou explicatif. Mais qui change de monde dans un second temps et devient un personnage à part entière de l'histoire en obtenant un rôle plutôt important dans notre récit.


Dernier petit rajout, j'ai vu ici et là qu'on critiquait l'utilisation de la théorie du chaos en disant qu'elle n'était là que pour faire "intelligent" sans être réellement abordé. Le fait est que la théorie du chaos n'est ici qu'un prétexte pour mettre un nom sur l'aspect cause/conséquence de la prise de position d'un individu seul face à la société. L'idée est simplement de faire comprendre rapidement au spectateur que pour lancer un soulèvement il peut suffire que quelqu’un face le premier pas pour que le reste suive. On reprend simplement les bases de la théorie du chaos (petit événement/grande conséquence) sans chercher à aller plus loin. En fait on aurait pu même l’appeler la théorie de la moussaka géante que ça n'aurait pas changé grand-chose c'est juste que la théorie du chaos est plus connue du grand public.

Dr_Stein
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le 23 sept. 2015

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Dr_Stein

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