Real humans, ça aurait pu être l’histoire de deux jeunes types, relativement cool, deux potes un peu limités et en galère de thunes et qui auraient eu une « idée ».
Le premier, finissant le tome 3 de Walking dead s’adressa à l’autre*.
« On devrait faire une série. Un truc sur les rapports sociaux, montrer comment être humain, c’est craignos** genre l’homme est un loup pour l’homme, Locke et compagnie.
— Excellent ! Ils évolueraient dans un contexte de crise, de recherche d’identité, les communautés apeurées s’affronteraient...
— Et il y aurait des zombies partout ! »
C’est là que le second type interrompit le premier. Ils ne pouvaient décemment pas reproduire la même chose exactement que Walking dead. Mais rarement à court de ressources, Hans*** eu le déclic. « Des robots !
— Des cyborgs ?
— Des entités mi homme mi machine. Et elles s’affranchiraient des règles d’Asimov, parce qu’on est trop cool, et les robots deviendraient humains.
— Un monde futuriste ?
— Ouais... Mais on n’a pas un rond. Alors ce sera juste des robots avec du sang bleu et on utilisera les tablettes tactiles de ta grand-mère et le reste du monde n’aura pas changé.
— C’est pas un peu bidon ça ?
— T’occupe John**** on va créer des robots robots, complètement crétins, des robots évolués, des robots à tout faire, des bonnes, des coachs sportifs et tout. On inventera une méthode qui libère les robots, ils deviendront autonomes et humains. Ils auront des émotions et ils penseront. Enfin, parfois. Ils pourront être violents.
— T’as pas peur que ce soit un peu fouillis tout ça ?
— C’est la profondeur du truc tu comprends rien. On fait une série intellectuelle ou pas ? »
Il fallu convaincre Owe de se lancer sur le créneau de la série typée intello. Hans accepta de glisser quelques bonnasses dans le casting, mais genre la bombe de chez bombe. Mais comme il s’agit, c’est l’idée qu’ils s’en font, d’une série intelligente, Hans convainquit Owe de ne leur donner que des rôles chiants et vraiment inutiles. Si Hans céda sur un point : il pourrait y avoir du cul avec des robots, il refusa de créer des scènes exprès. Tout resterait propre et clean.
Owe et Hans fêtèrent cette idée de génie avec quelques packs de bière. Ils continuèrent leur conversation avec la nuit qui tombait (à cette époque de l’année, la nuit tombait en Suède). « Il y aura des robots gentils et des robots méchants.
— Et on filmera tout en vert, pour faire vintage comme Derrick
— Il y aura des humains très méchants et des un peu gentils.
— Et on fera une mise en scène où on cachera le début, comme ça il y aura des flashbacks tout le temps !
— Les cyborgs voudront être humains et les humains alterneront entre une consommation outrancière, une méchanceté sans nom, et un coeur gros comme ça.
— Ouais, et ils se poseraient tout le temps la question de qui est humain, c’est quoi être humain, qu’est-ce qui nous rend humains...
— T’as pas peur que ça fasse trop de questions ?
— C’est super tendance ça, les questionnements métaphysiques. Tu regardes pas la télé réalité toi ?
— Et à la fin, on y mettra une super morale : les gens avides de pouvoir et de secrets foutront une grosse pression aux héros, et il voudra mourir, parce qu’il détestera ce monde rempli de vilaines âmes corrompues.
— On mettra un viol ?
— Un viol de robot !
— Oh putain l’idée de génie.
— Mais on ne montrera rien je te préviens. »
Comme l’un des deux se mit à bouder, l’autre en profita pour installer une caméra cheap, des personnages chiants et des intrigues secondaires vraiment merdiques. Il insista sur le questionnement de l’humain de manière bien lourde, tartinant chaque épisode de philosophie de comptoir, avec un gamin qui chiale parce qu’il est amoureux d’un robot, un vieux gros dégueulasse en perpétuelle recherche de rédemption parce qu’il a tapé sa femme qui voulait s’envoyer son bot, qu’il les a détestés, puis re aimé, puis re détesté...
Comme le résuma finalement Owe, au sortir de leur mémorable cuite : « On va faire de la merde hype, mais putain, on va s’en mettre plein les poches. »
* propos librement traduits du suédois, cette langue de merde
** les Suédois disent encore « craignos » et c’est la honte
*** même les mecs cool en Suède ont des prénoms à la con
**** le deuxième suédois ne s’appelle pas vraiment John. Ceci est un clin d’oeil à Plug_in_papa. En réalité, le mec s’appelle Owe, ou un truc du genre.