Zou ! C'est ainsi, sur ce zou impénétrable, que Remember rejoint le club très sélect des dramas visionnés en intégralité dans un court délai, sans jamais avoir provoqué le moindre bâillement (accomplissement exceptionnel pour une série judiciaire !). Il suffit de placer Park Sung-Woong sur deux posters officiels pour remporter mon entière attention, de toute façon... Allez, revoyons ensemble ce petit bijou (soyez prévenus, je divulgue sans remords les grandes et petites lignes du drama).
Remember, c'est un mélange bien dosé de mélodrame, d'action et de judiciaire, avec un soupçon de romance et de comédie, dans lequel nage — et se noie parfois — une tripotée de personnages, presque tous étiquetés de leur qualité. S'affrontent donc continuellement et durement avocats, procureurs, juges, policiers et malfrats, aussi bien au tribunal avec la loi, que sur les docks avec leurs poings. Tous s'entre-dévorent à cause d'un seul individu, dénommé Nam Gyoo-Man.
Présenté d'emblée comme le vilain du drama, Nam Gyoo-Man est incarné par l'excellent Namgung Min, qui apparaît si souvent à l'écran qu'il serait injuste de lui refuser le titre de rôle majeur. Aucun doute n'est permis au spectateur : cet héritier arrogant est véritablement un grand cinglé, à la limite du sociopathe ; souvent pris de soudains — et ridicules — accès de rage, il est foncièrement violent et dénué de compassion. Il s'amuse la plupart du temps à démolir des ordinateurs, à frapper ses employés et à insulter tous ceux qui croisent sa route. Mais comment détester un scélérat si Namgung Min lui prête ses traits (l'acteur semble s'être entiché des rôles diaboliques depuis Sensory Couple) ? Malgré son caractère peu engageant, Nam Gyoo-Man sait émouvoir quand il le faut, notamment lorsqu'il est en présence de son terrible père (le jeu de l'acteur est éblouissant dans les deux derniers épisodes).
C'est autour de ce méchant-là que virevoltent donc les autres personnages, tous autant qu'ils sont, car ce sont ses actions à lui qui lancent l'histoire du drama et qui la ponctuent jusqu'à la fin. Coupable du viol et du meurtre d'une étudiante, Nam Gyoo-Man échappe à la justice lorsqu'un autre homme est découvert non loin de la scène de crime, sans qu'il soit capable d'expliquer sa présence sur les lieux. Ce bouc émissaire parfait est le père de Seo Jin-Woo (interprété par Yoo Seung-Ho), un lycéen atteint d'hypermnésie et constamment au bord des larmes. Mais si Jin-Woo « se souvient de chaque jour de sa vie en détail », la mémoire de son père est, elle, rongée par Alzheimer. Le garçon part alors en quête d'un avocat prêt à défendre un homme démuni et franchement en mauvaise posture.
C'est ici qu'entre en scène l'excentrique Park Dong-Ho, un avocat fier de ses multiples victoires au tribunal (il n'aurait jamais perdu une affaire) mais dont les méthodes sont souvent discutables ; incarné par le fabuleux Park Sung-Woong (spécialiste des thrillers et autres films d'action), l'avocat Park est la première « grande personne » à se ranger du côté de Jin-Woo. La relation — plus tard conflictuelle car tissée par une fatalité au sens de l'humour décalé — entre ces deux-là était pleine de promesses : j'avais l'espoir que Jin-Woo devienne le protégé de l'avocat et qu'ils reproduisent le schéma père-fils dont tous les deux avaient été tristement éjectés... mais ce ne sera jamais vraiment le cas, c'est bien dommage.
Ce sont ces hommes très différents (Seo Jin-Woo, Park Dong-Ho et Nam Gyoo-Man) qui donnent son sous-titre au drama : « War of the Son », car tous trois sont si dévoués à leur père respectif qu'ils vont jusqu'à trahir leur propre intégrité pour aider ou honorer la figure paternelle. Si Jin-Woo est prêt à tout afin de sauver la vie de son père, l'avocat Park désire réhabiliter la mémoire du sien, décédé il y a longtemps ; quant à Nam Gyoo-Man, il ne cherche qu'à rendre son tyran de père fier de lui. Tous sont finalement orphelins, privés de ce qu'ils convoitent le plus : l'amour d'un père.
Évidemment, le procès du père de Jin-Woo est une catastrophe et le pauvre homme est condamné à la peine de mort pour un crime qu'il n'a pas commis (bien qu'il en vienne lui-même à douter de son innocence). Hop ! première défaite traumatisante pour l'avocat Park et nouvel objectif pour le fils de la victime : devenir le meilleur avocat du pays pour sauver son père. Quatre années passent ainsi en ellipse. Jin-Woo réapparaît, plus mature, plus confiant qu'auparavant ; il retrouve une vieille connaissance, Lee In-Ah, nouvellement procureur, et l'avocat Park, désormais employé par la famille du vilain Nam Gyoo-Man, dite famille Il-Ho. Une quantité de procès s'ensuit (une abondance parfois trop répétitive), conduits soit par Jin-Woo, soit par Park Dong-Ho, mais toujours connectés d'une certaine façon à l'affaire première du meurtre ou à son responsable.
Ce qui aurait pu être un drama ennuyeux ne l'est pas grâce à la multitude de personnages, acteurs des procès successifs — et nommément le secrétaire (ou homme à tout faire) de Nam Gyoo-Man, Soo-Bum, ou celui de l'avocat Park, Sang-Ho ; seule Nam Yeo-Kyung, sœur du meurtrier, flotte sans intérêt à la surface du drama (elle est absente de la plupart des épisodes — alors que présente sur l'une des affiches... probablement parce que son interprète est allée s'amuser chez KBS, dans Oh My Venus).
Remember ne satisfait jamais le spectateur ; rien n'est simple, rien n'est acquis. Les retournements de situation s'enchaînent sans que soit donnée l'assurance d'une fin heureuse... d'ailleurs, elle ne l'est pas vraiment. C'est pourtant cette continuelle incertitude quant au devenir de chacun des personnages qui fait la qualité du drama. La série ne s'embarrasse pas non plus d'une romance excessive, qui aurait été déplacée dans cette sombre histoire d'hommes corrompus et de justice frelatée.