La série Sherlock est une véritable totalisation, elle mêle avec une aisance presque évidente le cinéma à la musique, au théâtre, à la peinture... Elle est aussi une oscillation permanente entre le relationnel et le policier. Mais ce qui est d'autant plus marquant, c'est lorsque ces deux aspects s'entremêlent et s'interpénètrent pour ne former qu'une relation policière, ou une enquête relationnelle, au choix 8)
L'amitié profonde qui lie les personnages de Sherlock Holmes et de John Watson et d'ailleurs elle aussi ambiguë: à la fois dévote, admirative, presque amoureuse parfois; elle constitue le fil rouge de la série et tisse l'étoffe des enquêtes. Ils se complètent tous deux à la perfection avec, d'un côté, un sociopathe au syndrome d'Asperger, et de l'autre, un homme généreux, compréhensif et amical (Dieu sait s'il doit l'être). Ainsi, sans jamais tomber dans un pathos basique qui ferait défaut à la série; leur amitié est captivante et fascinante.
Les deux personnages sont d'ailleurs interprétés avec brio. Bennedict Cumberbatch révèle son talent par son impassibilité ténue, son expression véhémente et sa passion inébranlable pour le mystère. Martin Freeman de son côté exécute à merveille le rôle de l'ami ému et taquin, mais surtout fidèle en toutes circonstances.
Le côté policier est lui aussi cinématographiquement traduit à la perfection, notamment avec le "mind palace" de Sherlock. Certaines séquences dévoilent en effet son fil de pensée, à la fois de façon originale, comique et compréhensible. Ses idées fourmillantes se déploient sous nos yeux comme des données d'ordinateur, des cartes ou des images mentales avec une facilité exquise: on est littéralement jetés dans sa tête.
Pour finir, la série Sherlock est ce que nous pourrions appeler "un ascenseur émotionnel". Du rire, elle nous fait passer aux pleurs, de la détente à la tension, du vraisemblable à l'invraisemblable, de l'illusion au réel, de la surprise à la certitude. En somme, cette série est une sorte d’œuf Kinder: on imagine le contenu latent, mais il est en fait tout autre chose, ce qui n'empêche pas de combler nos attentes mais au contraire de les renouveler sans cesse.