Si le royaume du Danemark s'avérait être un lieu propice à une tragédie familiale, Charming (bourgade inventée par les créateurs de la série) est quant à elle le théâtre d'une tragédie identique. Sons of anarchy est effectivement une adaptation plus que libre – mais très intelligente cependant – de l’œuvre shakespearienne. Un père (John Teller… associé très vite à John le révélateur) meurt, laissant son club SAMCRO, au main du douteux Clay qui, comme par hasard, a hérité également de la charismatique Jemma, épouse du chef défunt. Jax, fils de John et Jemma, découvre les « mémoires » de son papa où il apprend que les Sons n’avaient pas fonction de traffic d’armes mais que John lui prédisait un avenir plus « saint ». Par peur du plagiat sur Ghost Whisperer (et Dieu sait comme cela a dû être tentant), Kurt Sutter a préféré au fantôme qui apparaît à Hamlet des mémoires retrouvées que l’héritier aime à lire isolé sur le toit du garage-couverture-des-activités-illégales de SAMCRO.
De la première à la dernière saison, les motifs des tragédies antiques transparaissent : mère jalouse, à la frontière de l’inceste, tromperies, soif de pouvoir, avidité, cupidité, lutte de clans comme autant de lutte entre des familles puissantes, rivalité entre femmes influentes et comploteuses. Le tout habilement trempé dans l’univers crasseux de club de motards distingués. C’est du Racine déguisé en Walker Texas Ranger. Le tout est parfois assez manichéens mais assez torve pour que le spectateur se perde : qui croire ? Jax veut-il le bien du club ? Son bien ? Le bien de son fils ou de sa femme ? Est-il méchant ou gentil ? Là se situe peut-être le bémol à apporter à cette critique dithyrambique : Charlie Hunnam qui joue Jax Teller n’est pas le comédien le plus subtile de sa génération et sa démarche lourde, ses baskets d’ado perturbent parfois.
Une série dont l’intensité dramatique n’a cessé d’augmenter au fil des 6 saisons (où d’ailleurs cela va-t-il conduire ?). A voir et à revoir quoi….