A contrario de la plupart des critiques lues, je pense que cette série d'Anime Japonaise fera date parmi les productions tirées de l'univers Terminator, peut-être même qu'avec du temps et du recul elle deviendra culte.
Le visionnage de cette série m'a inspiré exactement le même sentiment que les Animatrix à leur époque dans la manière dont ils s'étaient emparés de l'univers de Matrix, en tout cas pour les meilleurs d'entre eux que sont surtout les 2 épisodes de La seconde renaissance de Mahiro Maeda ainsi que Beyond de Morimoto Koji. Ces interprétations par le Manga de l'univers cinématographique des frères/soeurs Wachowski m'avaient paru beaucoup plus intéressantes que toutes les suites qu'ils avaient données à leur premier film. Ce qui m'avait frappé c'est la manière toute Japonaise de s'emparer de l'idée de Machine et d'y mettre ce point de vue qui mêle Bouddhisme et Shintoïsme et qui tranche particulièrement avec la manière occidentale d'appréhender le sujet et c'est, à mon avis, exactement ce que cette série tente de faire avec Terminator Zéro.
Dans le Shintoïsme comme dans beaucoup de religions Animistes presque tout ce qui existe a un esprit, une âme; humains, animaux, objets, robots et concernant les trois derniers, cet esprit qui les habite est totalement indépendant de toute interaction avec l'Homme. C'est donc dans la perspective de cette conception du monde que Malcom, le personnage principal, va tenter de programmer l'entité artificielle qui viendra peut-être s'opposer à Skynet et sauver l'humanité.
Le moment très significatif de l'application de ce précepte Shintoïste est quand Malcom demande à cette entité (pas encore programmée) de se nommer elle-même. C'est dans cette scène que le Zéro du titre prend toute sa dimension, comme si la solution au désastre que les machines allaient créer était de revenir au Degré zéro de la programmation, c'est à dire d'y mettre initialement, avant toute affectation à une tâche, une croyance, une Foi, que les programmateurs occidentaux (Américains!) n'avaient pas eu avec Skynet et qui consisterait à miser sur la conscience et le libre-arbitre que la machine allait elle-même générer en échangeant avec son concepteur.
Cette idée du Degré Zéro de la programmation n'était pas sans me rappeler la fameuse scène de 2001, qui résonne comme une scène inversée par rapport à celle précédemment citée de Terminator Zéro et qui montrait le personnage de David Bowman déprogrammer HAL, l'ordinateur homicide; HAL programmé à égaler et dépasser les hommes en terme d'excellence et de performance et qui avait décidé de les éliminer purement de la mission en fonction de principes dont découlaient des priorités qui avaient été programmées par ces mêmes hommes. Les motivations de Skynet sont identiques quant à sa décision d'éliminer l'humanité car elles participent, à l'instar de HAL, d'une conception uniquement performative: dans ce cas là en terme de programmation la machine n'a pas d'âme, ce n'est qu'un super outil. Sujet passionnant en ce moment où maintes craintes font surfaces concernant l'avènement des Intelligences artificielles et qui pose la seule question valable: de quoi est faite leur programmation et quelles valeurs sert-elle?
Nous avons donc à faire dans cette série à deux paradigmes qui s'affrontent en terme de conception de l'AI, le paradigme Prométhéen qui est Skynet et le paradigme Animiste qui est l'entité artificielle élaborée par Malcom, Kokoro. Et encore à contrario de certaines critiques, je trouve tout à fait judicieux de la part des scénaristes d'avoir répété les mêmes types de personnages et enjeux récurrents dans Terminator, car c’est la condition pour que la série ouvre cette nouvelle voie en confrontant les enjeux classiques de la franchise à de nouveaux: à l’extérieur a lieu toujours le même conflit, confrontant hommes et machines aux mêmes écueils, la machine ne représentant là que l'excès prométhéen de l'homme qui se retourne contre lui, alors que dans la salle hermétique où Malcom est enfermé avec l'entité Kokoro se joue une nouvelle conception du rapport homme-machine.
C’est dans le rapprochement de ces deux enjeux, l’ancien et le nouveau, que la saga prend une toute nouvelle dimension, une dimension que toutes les tribulations scénaristiques faites de paradoxes temporels à répétitions qui se mordaient la queue dans la plupart des suites de Terminator n’avaient jamais atteint et qui entraine la franchise dans une voie qu'un Arthur C Clark ou Isaac Asimov n'auraient pas reniée. Et puis je crois savoir que Cameron lui-même est amateur des mangas truffés de questionnements métaphysiques de Mamoru Oshii, donc il doit certainement trouver son compte dans cette série.