The Fall
7.4
The Fall

Série RTÉ One (2013)

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Le concept de base de la série m'a séduite (pour une fois pas de mystère sur le tueur mais une observation parallèle de ses agissements et des avancées de l'enquête), la promesse d'une vision un peu moins manichéenne des évènements aussi mais force est de constater que partir avec de très bonnes intentions ne suffit pas à faire une série remarquable.


Avant toute chose je voulais quand même souligner l'usage très réussi du contexte de Belfast, avec ce qu'il faut de rappel de la tension politique qui règne sur la ville, de référence aux oppositions religieuses et d'accent à couper au couteau. Ensuite, et contrairement à beaucoup, je n'ai pas été perturbée par le rythme, qui m'a même plutôt séduite. Quoi que lent celui-ci permet de partir sur une ambiance plutôt réaliste où il faut plus de 5 minutes pour explorer une scène de crime/récolter les indices/les rapporter au labo/les faire analyser, mais aussi de laisser le temps aux personnages de se développer et aux relations de s'établir.


Maintenant qu'on a évacué ces deux aspects très positifs, il reste à parler des éléments moins remarquables...
Déjà les personnages. En eux-mêmes ils ne sont pas inintéressants, le scénario faisant des efforts pour leur attribuer à tous leur lot de forces et de faiblesses,


(à l'exception du pauvre Jim Burns, dont le visage perpétuellement triste et l'air d'être toujours au bord du gouffre s'explique facilement dans la mesure où il ne semble pas être foutu de prendre une seule bonne décision et d'engranger un seul succès pendant toute la série)


ce qui les rend tous humains et potentiellement éligibles à notre sympathie. Oui mais. Mais, premier problème, tout cela ne s'applique pas à notre tueur, qui malgré moult faiblesses, n'est jamais sympathique pour autant dans la mesure où même dans les scènes où il est sensé endosser le rôle de parfait père de famille il se montre désagréable au possible, autocentré (mention spéciale à sa pauvre fille qu'il ne considère que comme un alibi sur patte) et peu intéressant (on se demande comment Katie a pu le trouver passionnant et hyper cultivé sachant que s'il lâche 10 mots dans une conversation c'est déjà un exploit). Bref il pue le type louche à 100 km, tant et si bien qu'on arrive pas bien à comprendre comment personne n'a pu flairer l'embrouille avant.


(ici on pense particulièrement à sa femme, dont l'insignifiance n'a d'égale que la bêtise crasse puisque même une fois arrêtée elle n'avait toujours pas saisi le problème avant qu'on lui explique)


Enfin outre le cas Spector, le vrai gros problème c'est que les personnages sont presque tous très mal introduits dans la série. Ils apparaissent et disparaissent du scénario sans qu'on ne sache pourquoi, on fait naitre des attentes pour des personnes dont au final les scénaristes n'ont rien à faire


(je pense ici à la flic rousse)


et à l'inverse on voit arriver comme une évidence des personnages dont rien n'indique avant qu'ils ne sont pas de vagues figurants.


(hello Mme la légiste)


Au final c'est un peu le bazar, et faute de savoir qui doit vraiment mériter notre attention à part Stella, on ne s'attache à personne et on accepte de les voir aller et venir comme dans un hall de gare sans rien attendre de plus.


Mais le vrai problème, auquel on touche déjà un peu avec ce problème de gestion des personnages, ce sont les grosses incohérences qui émaillent le scénario.
D'abord il y a toutes les ébauches d'intrigues dont on pense qu'elles vont mener quelque part et qu'en fait non.


L'exemple le plus frappant étant sans doute l'histoire de corruption initiale dont personne n'a plus rien à faire passé les deux premiers épisodes (sauf vaguement à la fin pour faire comprendre que, oups, on avait un peu zappé mais en fait c'est bon le chapitre est clos) ou le pauvre flic qui se fait descendre dans l'indifférence presque générale.


Ensuite il y a les coïncidences tirées par les cheveux et les réactions totalement surréalistes de certains personnages.


Niveau coïncidence, songeons à la découverte miraculeuse de Rose, qui se trouve par un heureux hasard être une amie de la légiste, qui se dit tout de suite que le type un peu fêlé que sa copine voyait il y a 9 ans pourrait être le tueur, piste sur laquelle tout le monde s'engouffre à toute vitesse alors que, par contre, personne ne se donne la peine d'une balade en voiture de 10min pour vérifier l'alibi de Spector au moment où il se présente à la police comme témoin. En outre je n'ai toujours pas compris par quel miracle miraculeux le nom de Spector n'était pas apparu plutôt dans l'enquête parce que si passe encore que la baby sitter soit une dinde écervelée amoureuse prête à tout, je ne vois pas trop par quel truchement la nana qu'il rencontre dans le train peut être à la fois assez flippée par cette histoire de tueur en série pour se teindre les cheveux et assez décontractée pour garder pour elle une conversation avec un mec louche qui lui "ah ah t'a vu le tueur, on dirait trop moi non?".


Enfin il y a tous les moments où on ne comprend pas bien ce qu'ils fabriquent avec l'enquête, alors que justement le rythme lent est supposé servir à nous expliquer pas à pas le déroulement de la procédure et la rendre crédible.


Par exemple pourquoi personne n'a jamais placé cette pauvre victime hospitalisée sous réelle protection (parce que non un officier seul qui croit quelqu'un sur parole quand il donne son nom c'est pas le high level de la sécurité) alors même que visiblement les journalistes ont révélés qu'elle était encore en vie et amnésique (seule explication plausible pour que le tueur se dise que c'est sans risque de se proposer comme thérapeute)? Pourquoi arguer des problèmes de moyens de la police au début la série alors qu'ils ont finalement les moyens de faire perdre leur temps à 70 personnes pour suivre un type qu'ils n'ont pas le droit d'arrêter? D'ailleurs pourquoi est-ce que ça devient plus acceptable de l'arrêter après le coup d'éclat de James qu'avant qu'il se mette à détruire toutes les preuves à charge, sachant qu'il ne les a dans tous les cas pas encore menés à Rose? Et enfin pourquoi est-ce que personne ne se dit que quitte à amener un suspect en forêt pour qu'il nous guide vers une de ses victimes ça ne serait pas mieux qu'il montre réellement le chemin (d'autant plus que niveau sécurité le laisser seul avec un type qui fait la moitié de son poids alors qu'il a par ailleurs déjà fait l'objet d'une tentative de meurtre de la part d'un type qu'ils n'ont pas encore arrêté, ça ne sonne pas franchement comme un bon plan)?


Pour conclure, ce n'est pas une mauvaise série, elle fait de son mieux pour essayer de proposer une alternative aux séries policières classiques, mais si on veut vraiment plonger dedans il vaut mieux éviter de se poser trop de questions.

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le 16 avr. 2015

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