Œuvre complexe et multiforme, truffée de symbolisme et emplie d’une puissance spirituelle toute remarquable, The New Pope transcende le propos de son prédécesseur pour le sublimer de la plus belle des manières. Paolo Sorrentino signe ici son chef-d’œuvre sériel, voire son chef-d’œuvre tout court, duquel surgit une surprenante vitalité, un bonheur vrai et un humanisme des plus sincères.
Débordante d’inventivité dans chaque plan, organisée et filmée à la perfection dans une lumière digne du Kubrick de Barry Lyndon, cette saison 2 ravira les adeptes de sens implicites et de personnages loufoques aux personnalités à la fois charmantes et diablement contradictoires. Nul esprit n’est épargné par la compromission au sein de ce Vatican monumental, antre d’une Église en pleine ébullition, que l’on sent prête à exploser au moindre soubresaut, et qui pourtant résiste inlassablement aux assauts venus de toutes parts pour finalement accomplir sa révolution.
On ne se lasse jamais de ces scènes millimétrées vues nulle part ailleurs (si ce n’est chez le cinéaste lui-même), qui saisissent avec une dextérité implacable cette zone grise de l’image entre le réel et l’irréel. De la Venise secrète des doges jusqu’à la chambre vaticane aménagée en salle de sport, en passant par les longs couloirs du manoir des Brannox, The New Pope nous offre une déambulation spirituelle dans les méandres de l’esprit humain, pétri qu’il est de tant de peines, de solitudes, d’incompréhensions, de peurs, de chagrins indicibles mais aussi d'amour, avec tous les excès et les risques que celui-ci suppose.
John Malkovich, superbe et restituant à la perfection un rôle d’une très grande complexité vient épauler un Jude Law toujours aussi classe et juste dans chacun de ses regards. L’un comme l’autre peut compter sur des dialogues ciselés sur-mesure dans un anglais littéraire (en VO) des plus séduisants. Les rôles secondaires ne sont pas en reste, du formidable Silvio Orlando (Voiello) à la délicieuse Cécile de France (Sofia), sans oublier Mark Ivanir dans le rôle de Bauer, sorte de Doug Stamper du Vatican, ni Javier Camara, toujours aussi époustouflant dans le rôle du cardinal Gutierrez.
Sorrentino conserve cependant ce ton décalé qui contribue également à donner à la série toute sa saveur atypique. Cela passe par des répliques pleines d’un wit tout britannique ou des situations franchement comiques (Marilyn Manson), mais aussi par la musique : Lele Marchitelli signe encore une fois des compositions remarquables, auxquelles viennent s’adjoindre les extravagances du réalisateur dans les situations les plus improbables : Lily Allen, Jon Hopkins, Flume et j’en passe…
Intelligent, visuellement splendide, animé d’une vitalité aux influences protéiformes et porteur d’un message humaniste des plus profonds, The New Pope est une formidable réussite qui parvient sans peine à égaler et à surpasser le précédent volet, pourtant déjà franchement excellent. Une série qui au demeurant ne plaira pas à tout le monde, tant elle requiert patience, décodage mais aussi une forme de retenue sur le plan des attentes qui peuvent être formulées à l'égard d'une histoire qui n'a rien de normal et qui se laisse désirer, pour se dévoiler par touches successives et subtiles, par expectatives déçues et épiphanies inattendues.