Voici une mini-série de 8 episode oscillant entre 50 mn et 1h30 l'episode, qui envoie du très lourd.
Une série qui nous renvoie dans la gueule la lumière crue d'une réalité faisant froid dans le dos. Nous sommes loin des séries judiciaires/policières/pénitentiaires habituelles, où les joutes oratoires, les belles salles d'audience, les prisons stylisées et les sourires ultra bright tiennent le haut du pavé, très loin du terrain de la vraie vie.
Ici c'est le quotidien sans fard d'un commissariat de police au petit matin, c'est une salle d'audience mal eclairée et plutot etriquée avec des visages fatigués, c'est une plongée brutale dans le système carcéral, c'est la fin d'une innocence en un clignement d'oeil, ce sont des intervenants sans superpouvoirs, c'est une réalité sans artifices cinématographiques, qui nous fait peur dans le sens où ça pourrait nous arriver à tout un chacun un jour, et que sans les lumières superficielles du 7ème art nous descendrions en enfer comme ce jeune pakistanais dont le changement de personnalité est fatalement prévisible, la peur nouée au ventre.
Le réalisateur arrive à nous faire croire parfois que c'est plutot un documentaire qu'une série tv, tant on sent la crasse, la frayeur et l'injustice, en même temps qu'une normalité banalement terrifiante une fois du mauvais coté des barreaux.
Cette série parvient, sans rythme effréné, à installer tout un cadre solide dès le pilote, et à instiller doutes et revirements d'opinions tout du long.
Car en plus d'etre une descente aux enfers d'un etudiant lambda du Queens, les scénaristes nous proposent une vraie intrigue policière, dont on ne peut pas deviner le dénouement, et encore plus fort, qui nous oblige à nous triturer les méninges, changeant d'avis à chaque épisode, grace à des pistes/fausses pistes et suppositions subjectives.
Pour appuyer ce brillant exercice du fond et de la forme, il fallait des acteurs au top. Et c'est le cas, avec un Turturro tout simplement eblouissant dans son role d'avocat confiné aux négociations pour les toxicos et autres tapineuses à la petite semaine, blindé d'eczéma et de soucis personnels, à la dégaine improbable avec son impérméable à la columbo et ses sandales. Il donne une epaisseur et une crédibilité hallucinantes à son personnage.
Riz Ahmed est habité par son role d'etudiant pris dans l'engrenage du système judiciaire americain, avec un changement graduel mais ineluctable de sa personnalité toute entière, une grande interpretation qui fait plaisir à suivre au fil de l'histoire.
La procureur aux traits fatigués et le flic atypique encore plus avachi sont ultra convaincants, et tous les persos secondaires incarnent leurs roles à merveille, donnant à l'ensemble une cohésion rarement vu sur une seule saison d'exploitation.
"The night of" est un petit bijou à la lumière crue d'une réalité qu'aucun de nous ne voudrait connaitre: celle d'un système qui broie d'une manière égale les innocents et les coupables dans une spirale infernale dont il est bien dur de sortir....
Pas besoin d'une seconde saison, celle ci s'auto-suffit amplement dans son exhaustivité.