Supergroupe donne rarement supermusique ; et Mad Season ne déroge malheureusement pas à cette triste règle... Rencontre éphémère de stars grunge camées en fin de réhab', Above, on le sent, vient pourtant tout droit d'une volonté commune de sortir des clichés du grunge, ce qui est tout à fait louable.
Mais réécouter ce disque 23 ans après sa sortie ne procure pour ainsi dire plus rien, si cela a été le cas à l'époque. Question de contexte ? Certainement. Le grunge, genre comète au même titre que le trip hop, est mort depuis le décevant Binaural de Pearl Jam (qui ne faisait qu'amorcer un déclin aujourd'hui consommé), et Above n'est plus aujourd'hui qu'un recueil de chansons parmi tant d'autres, qui brille bien plus par son ambition première, et éventuellement sa variété que par le résultat final.
La première chose qui marque, c'est cette production lisse, proche d'un format pop, où le moindre accro est gommé (voir les quelques stridences inoffensives de "Wake Up", les soit-disantes décharges électriques de "I'm Above", le riff comateux de "Lifeless Dead" par exemple), pour obtenir au final un son très rock us, dénué de toute personnalité.
C'est d'ailleurs le second grand problème de cet Above, qui peine à trouver son style, son unité, alors qu'il est mené par quatre caractères forts ! Trop de cerveaux pour un seul groupe ? C'est bien probable. Sans que l'on puisse dire pour autant que chacun cherche à tirer la couverture à soi...
Alors, on est ennuyé devant cet effort assez humble, qui n'en finit plus de commencer (le premier morceau correct intervient en fin d'album via "I Don't Know Anything", assez violent, qui nous fait d'autant plus regretter les oeuvres maîtresses des groupes respectifs de Staley et cie).
On est ennuyé parce qu'il propose une alternative finalement vaine à un courant qui a marqué une génération.
Et d'autant plus ennuyé quand, à trois plages de la fin, survient un chef d'oeuvre, le grand "Long Gone Day", qui, lui, sort réellement de tout ce qu'on a pu entendre des quatre compères. OVNI au dessus d'un océan de conventions mélodiques, le morceau nous emmène très loin de Seattle. Et finalement, c'est "tout" ce qu'on demandait à Mad Season : un peu d'air au coeur d'une hype démesurée.
D'une certaine manière, l'instrumental "November Hotel", et le final "All Alone", rejoignent cette volonté de montrer un autre visage, à la fois plus épique, et plus serein. Mais quelle drôle d'idée de coincer les trois meilleurs titres d'un album à sa fin ! Comme si le combo n'assumait pas entièrement cette petite échappée belle, comme s'il ne voulait pas trop heurter la sensibilité des teenagers qui les ont fait connaître...
Alors bien sûr, on peut concevoir qu'à l'époque, Mad Season ait attiré l'attention. Mais aujourd'hui, passé le culte voué aux deux membres du Supergroupe décédés d'overdose, il ne reste que quelques chansons blèmes, bien vite oubliées.