On m’avait parlé de Leprous, mais jamais je ne m’y étais penché vraiment. J’avais rapidement écouté : Mouais. A part The Cloak, rien de folichon, le tout est très homogène, très long, bof bof.
Mais en écoutant Ihsahn, je me suis dit, tiens, je comprends pas, j’ai dû rater quelque chose.
Je m’y suis donc remis, et bizarrement ça m’alerte. Mais c’est génial ça !
C’est un album magique, et rarement j’ai été autant séduit. Le tout est cohérent, la dynamique entre et dans les morceaux est très bien gérée, les compositions sont très sobre, peu d’artifices genre solis ou double pédale.
La voix est toujours plus présente, en instrument à part entière (ces mélodies sur les ponts de The Valley ou Echo, sublimes). Einar (le chanteur principal) a encore progressé en technique, et sa voix fait le reste. Sur The Cloak par exemple, il atteint des notes extrêmes (pour un homme), et on sent une petite difficulté (sur le « Cry ») qui donne toute son ampleur à la chanson, un côté humain en sorte.
Il hurle moins, même si les passages hurlés (Coal et Chronic principalement, Contaminate Me aussi, mais j’en parle pas encore) font toujours leur effet et élargissent encore la palette vocale. Les chœurs sont nombreux aussi (Echo, ou le fade out dans toute sa splendeur), et apportent le plus, la grandeur à certaines chansons (la fin de Foe, géniale).
Les instrumentistes sont aussi au top, et se fondent en un groupe vraiment soudé, aucun instrument ne prend le dessus, mais tous se marient magistralement. On notera la présence de guitares 8 cordes (qu’ils avaient commencé à utiliser sur « Bilateral » je crois), notamment sur Chronic et son break, lourd, et tellement groovy en même temps. La basse n’est jamais en retrait (le break de Echo, avec cette tourne lancinante) et la batterie est tout simplement énorme, jamais dans la démonstration technique gratuite, et avec des parties affolantes (le break de Contaminate Me, en roue libre totale).
On a quand même droit à des morceaux de bravoure, comme The Valley et sa syncope désincarnée, qui amène le morceau sur sa délivrance presque pop.
Ihsahn est bien sûr de la partie avec des chœurs sur Chronic, où sa présence est presque anodine, contrairement à Contaminate Me, où il hurle en réponse à la voix claire d’Einar.
Ce morceau justement, le plus violent de l’album, le plus déconstruit aussi, est l’un des meilleurs morceaux de fin que j’ai pu entendre. Ihsahn y hurle ses vers, dans son cri si caractéristique, quasiment à l’agonie en fin de chanson, où un violon d’une tristesse absolue vient se greffer sur les derniers hurlements du norvégien. Le chaos, l’apocalypse, voilà ce qui me vient à l’esprit en pensant à cette fin.
Ce morceau est gigantesque, et clôt un album qui l’est tout autant.
On pourra regretter certaines structures de morceaux trop semblables (The Valley/Echo et The Cloak/Salt), mais là c’est vraiment pour donner un point négatif, puisque il en faut un, la perfection restant inaccessible.
Leprous n’a jamais autant mérité son étiquette progressive ou expérimentale, tant cet album est à l’opposé du metal classique. Mélodique, sobre, mais aussi très sombre, presque froid, Coal est pour moi le meilleur album de Leprous, celui qui leur permet de définitivement se détacher, de s’envoler vers un style dont ils définissent les contours à chaque nouvel album.